La liberté d’expression, j’y reviens, une fois encore. C’est un droit fondamental dans notre société, mais s’agit-il d’un droit absolu ? En fait, la question ne date pas d’hier, elle remonte aux débats, au moment de la Révolution française, sur la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Continuer la lecture
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Travailler moins
Travailler moins pour que tout le monde puisse travailler, joli, non ? Nous vivons aujourd’hui dans une société où certains travaillent beaucoup, comme mon mari et d’autres pas du tout, comme mon fils. Ceci dit, il aimerait bien pouvoir travailler mais il n’y a pas d’emploi à la Réunion, comme dans beaucoup d’autres départements, régions ou pays. Continuer la lecture
Prendre le mors aux dents
Prendre le mors aux dents, là, il est encore question de liberté : liberté de choisir sa vie.
Vous avez assimilé des tas d’idées pour être heureux, vous vous êtes enfin compris, vous avez réussi à remonter la pente quand vous aviez un coup de blues, vous arrivez à vivre un peu plus pour vous, et un peu moins pour et par les autres, vous savez dire ce que vous voulez, mais en face on ne vous entend pas, en face on ne répond pas… Que faire ?
Longtemps, vous arrivez à oublier cette incompréhension et vous avancez droit dans vos bottes, brave petit soldat. Et un jour, ça vous pèse trop, à nouveau. Un petit coup de blues, des épisodes de nostalgie et hop, on révise, on va relire l’article “estime de soi” (5 février 2011) et on continue.
Si l’autre ne répond toujours pas, ce n’est peut-être pas parce qu’il ne vous accorde aucun intérêt mais simplement qu’il a d’autres intérêts, souvent lui-même exclusivement, l’égoïsme est le problème essentiel.
On peut ajouter que certaines personnes veulent rester fidèles à leurs idées, à leur façon de vivre, à elles-mêmes et qu’elles se complaisent dans le mensonge et l’hypocrisie ; elles le nient ; c’est tellement plus facile de ne jamais se remettre en cause.
En plus, si pendant longtemps, vous n’avez pas osé vous manifester, c’est-à-dire que vous n’avez pas osé vous exprimer clairement, sans crier, sans hargne, sans colère, de peur qu’on ne vous quitte, qu’on ne vous aime plus, commencer à vous faire entendre va casser le rythme. On ne vous comprendra plus, mais on ne partira pas, on vous mettra la faute sur le dos jusqu’à vous accuser délibérément des travers que vous n’avez jamais eu. Là, je parle en connaissance de cause, je viens de m’entendre dire que j’avais oublié une information essentielle. Je n’ai pas crié, j’ai juste constaté un fait de plus de trente ans. Je ne développe pas davantage, ça n’en vaut pas la peine.
J’ai admis, enfin, que l’incompréhension ou le refus de l’autre ne m’enlève pas le droit d’avoir des désirs, de les exprimer et à terme, de les réaliser.
Personne ne peut m’empêcher de dire la vérité, même si l’autre veut la travestir, dans certains cas, c’est impossible : il y a des témoins et une seule vérité claire, nette, précise.
Je ne dois plus attendre de recevoir ce que l’autre n’est pas capable de me donner. J’ai oublié de vivre pour moi, je vais y penser et le faire ! Au plus tôt !
Pourquoi donc titrer “prendre le mors aux dents” ? Parce que j’aime les expressions et que celle-là convient dans sa deuxième acception. Je m’explique.
Prendre le mors aux dents, c’est : soit se laisser aller à la colère, soit se mettre soudainement et avec énergie à un travail, à une entreprise…
Le sens initial de cette expression vient du monde équestre. Le mors est un élément du harnais, une pièce qui traverse la bouche du cheval, qui repose sur une zone édentée à l’arrière de la mâchoire, et qui sert à le diriger. Si jamais le cheval prend le mors aux dents, c’est-à-dire si cette pièce s’avance au-dessus des dents, il devient impossible de diriger l’animal qui s’emballe. Autrement dit, ” le mors aux dents” a d’abord été le symbole de l’emballement.
Le deuxième sens de l’expression vient d’une autre manière de voir la chose : si le cheval prend le mors aux dents, il peut en faire complètement à sa tête et en quelque sorte décider de son sort. Il prend une nouvelle bonne résolution et s’y tient.
Pour moi, elle confirme l’existence de la liberté d’action. Ca me rassure. Pas vous ?
Des saints pas très catholiques
Je ne veux choquer personne mais il est deux saints qui se rappellent à moi régulièrement : un homme et une femme, Glinglin et Nitouche.
Glinglin, je l’aime bien. Nitouche, c’est autre chose.
Je ne les ai pas trouvés au calendrier, vous vous en doutez. On invoque parfois l’un, et on évite de mentionner l’autre.
Saint Glinglin est fêté un jour fictif : le 30 ou le 31 février, voire le 32 décembre ; c’est une fête mobile. Sainte Nitouche ? Je ne sais pas.
Invoquer Saint Glinglin, c’est renvoyer à plus tard voire à jamais l’accomplissement d’un acte, en général désagréable ou indésirable. L’origine de l’expression viendrait de la déformation de seing et gling : le signe, plus le son des cloches, ce qui voulait donc dire, à l’origine, quand les cloches sonneront. Or, après Pâques, elles sonnent…
« Avoir lieu à la Saint Glinglin » est synonyme de « remettre aux calendes grecques (les Grecs n’ayant jamais eu de calendes, c’est une date inconnue), « à la semaine des quatre jeudis », « quand les poules auront des dents » ou « à Pâques ou à la Trinité » (c’est d’une chanson qu’est née une expression : Malbrough, s’en va en guerre, « il reviendra à Pâques ou à la Trinité », c’est-à-dire un jour peut-être, ou bien jamais).
Pourtant, Glinglin est plus ou moins officialisé en France, avec une date pour le fêter. Les étudiants en droit le savent. On leur raconte rapidement, durant leur cursus, l’anecdote suivante : un débiteur très astucieux avait promis de rembourser son créancier le jour de la saint Glinglin. Le Créancier, perdant patience en ne voyant pas arriver le paiement, porta l’affaire en justice. Le tribunal rendit, avec beaucoup d’humour, le jugement suivant :
« Attendu que la Saint Glinglin ne figure pas dans le calendrier, mais qu’il existe une fête collective de tous les saints qui n’ont pu y trouver place, le 1° novembre, jour de Toussaint ;
Attendu, en conséquence, qu’il y a lieu de fixer au 1° novembre la Saint Glinglin ;
Par ces motifs, contradictoirement et en dernier ressort, condamne le débiteur à payer la somme réclamée avant le 1° novembre. »
Méfiez-vous donc si vous avez un problème de trésorerie, en droit français la saint Glinglin est notée pour la Toussaint.
Méfiance aussi avec Sainte Nitouche !
La Sainte Nitouche (au pluriel, des saintes-nitouches), je ne l’aime pas. Je crois que vous aviez compris. Et dire que certains leur donnent le bon Dieu sans confession.
Une sainte est une personne qui a eu une vie exemplaire, qui a observé l’évangile durant toute sa vie, moralement, physiquement et religieusement , à tel point qu’elle a été canonisée. Cette femme a donc respecté des préceptes de vertu, de prières, Sainte Nitouche est censée être comme les autres saintes, étrangère aux plaisirs de la chair, elle se consacrerait uniquement aux nourritures morales et spirituelles. Mais oui, bien sûr… Surtout de nos jours.
C’est pour ça que je ne les aime pas les saintes-nitouches. Ce sont des hypocrites qui prennent des airs innocents de pucelles effarouchées. Dire que certains pensent encore épouser des oies blanches. Invraisemblable que les hommes soient si naïfs quand ils sont amoureux ! Ca ne leur passe même pas avec l’âge, encore moins quand ils sont fortunés. Et les saintes-nitouches continuent à jouer le même rôle toute leur vie : mielleuses, gentilles, fragiles. Et ça marche !
Cette expression se comprend facilement : “faire la sainte Nitouche” c’est se donner un air de “ne pas y toucher”, d’“affecter l’innocence”. Elle apparaît dès 1534 chez Rabelais dans “Gargantua”:
“Les uns cryoient: Sainte Barbe !
Ls autres: Sainct Feorges !
Les autres: saincte Nytouche!”
Sainte Nitouche, la sainte patronne de tous ceux (oui, il y a des hommes qui sont des saintes nitouches) qui jouent les prudes, Sainte Nitouche n’existe pas.
Mais les saintes-nitouches ne manquent pas.
Femmes instruites : danger !
Vous devez avoir horreur de l’instruction chez les femmes, par cette raison qu’il est plus facile de gouverner un peuple d’idiots qu’un peuple de savants. Honoré de Balzac
Doit-on autoriser les filles à apprendre à lire ? Grande question en France jusqu’au XIX° siècle ; aujourd’hui, alors qu’elles fréquentent les mêmes écoles que les garçons et ont, de façon générale, de meilleurs résultats scolaires, la question ne fait pas sourire. Vous étonne-t-elle ?
En 1801, Sylvain Maréchal rédige sa brochure “Projet de loi portant défense aux femmes d’apprendre à lire”. Il y a pourtant eu la Révolution douze ans avant, mais la Déclaration des Droits de l’Homme exclut les femmes (?) et la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges a été mise aux oubliettes. Maréchal est-il un réactionnaire ? Non, non, à la même époque, on retrouve partout la même volonté de limiter l’accès des filles au savoir à tel point que leur éducation n’est pas une affaire d’État et qu’elle est abandonnée à la famille et à l’Église. Guidés par la crainte des conséquences de l’oisiveté sur l’esprit des filles, familles et clergé cherchent à les occuper, à leur interdire de penser, à former de bonnes épouses et de bonnes mères (chrétiennes, catholiques de préférence), des femmes dociles, vertueuses, agiles aux travaux d’aiguille, aptes à la cuisine, voire capables de compter pour équilibrer le budget familial, soumises à leur père puis à leur mari. Il y avait bien quelques fortes têtes, mais la majorité se laissait faire : difficile de se révolter quand on est peu instruit(e) et isolé(e). Je parle des femmes mais manque d’instruction et isolement font souffrir des hommes aussi.
Aujourd’hui, en France, les femmes essaient toujours d’avoir les mêmes droits que les hommes : diplômes, salaires, emplois. Rien n’est gagné. Au contraire, tout risque de se perdre. Il ne ne faut surtout pas lâcher prise. Se battre contre le voile, c’est indispensable. Voile dans la vie privée mais pas dans la vie publique. Si la loi n’est pas respectée : visage découvert, je ne cache pas que j’ai peur, peur pour mes filles surtout et mes petites filles (dont la première est en fabrication), peur de me voir ou de les voir un jour obligées de se voiler la face au propre et au figuré : se dérober par honte au regard d’autrui ; se refuser à voir ce qui indigne ou horrifie. Je ne me voilerai pas la face, ni aujourd’hui, ni demain. Je ne veux pas refuser, aujourd’hui ni demain, de voir ce qui m’indigne.
Les images répétées de ces femmes sans visage, ensevelies sous la burqa, frappent ma conscience d’occidentale. Ces déprimantes silhouettes anonymes, monochromes, de préférence noires, quelquefois bleues, me rappellent le sort de milliers de femmes et de fillettes dans d’autres parties du monde. Femmes isolées, bâillonnées, emprisonnées, quelquefois excisées, mutilées… Femmes interdites de vie : pas d’instruction, pas de soins, pas de travail, pas d’autonomie ! Y a-t-il un choix véritablement libre de ces femmes ? Quel est le niveau d’endoctrinement de celles qui militent pour la burqah ? Libres ? Le sont -elles vraiment ? Libres chez elles de porter le voile si elles le veulent, mais nous avons choisi une loi en France, il faut la respecter. Pas besoin de la nouvelle création, celle qui date de plus d’un siècle est valable : “pas de signe distinctif d’appartenance religieuse ou politique”. Revoir mon article “Laïcité et voile islamique“ et l’inspection du lundi matin à l’école. Ma maitresse d’école était-elle une laïque intégriste ? J’ai survécu à ses “mauvais traitements” ; je n’ai pas oublié ; c’était comme ça.
La liberté de culte existe mais ne doit pas gêner le fonctionnement de la société. Il y a aujourd’hui un large fossé entre l’idéal républicain et l’idéal religieux, quelle que soit la religion ou la secte envisagée. C’est le problème des clans, tribus, régions, des indépendantismes divers. Nous sommes la race humaine et nous devons essayer de nous entendre pour que la Terre et nous, nous survivions en paix ; c’est mal parti.
En ce qui concerne l’Islam, je ne suis pas une spécialiste, j’ai des voisins et des amis musulmans, j’habite la Réunion. Ici, le dialogue est vraiment plus facile, donc en ce qui concerne l’Islam et le peu que je sais, la loi islamique me paraît bonne, juste, claire, comme celle des chrétiens. C’est la réalité des pratiques culturelles et religieuses qui gâche tout.
Il y a trente ans ou même vingt ans, ici à la Réunion, pas de burqah et pas de voiles envahissants : la mosquée, le muezzin, la prière, le Ramadam, l’Aid-el-Kebir, etc, ne gênaient personne (enfin le muezzin le matin… limite, mais les cloches à Pâques et à chaque heure, ce n’est pas terrible non plus). Qu’est-ce qui a changé ? L’intégrisme ? L’extrémisme ? Il me semble que l’extrémisme est étranger à l’esprit de la loi islamique, comme il l’est dans la religion chrétienne, ce qui n’a empêché ni les guerres de religions, ni l’Inquisition, ni, ni… L’intégrisme islamique reflète aujourd’hui des pratiques culturelles dérangeantes car non conformes à la tradition laïque française.
Il me semble que l’Islam, le vrai, le charitable, n’interdit ni la mixité , ni la liberté. Il y met quelques conditions de réserve, comme les catholiques et sans doute les protestants : la pudeur, la modestie.
Nous avons un peu oublié que les écoles, le catéchisme n’étaient pas mixtes, qu’on se couvrait ou se découvrait la tête à l’Eglise (les Hommes se découvrent toujours mais les femmes ne se couvrent plus). Les règles de base sont les mêmes dans toutes les religions, ce n’est que la pratique qui change : nous avons évolué, libéré les femmes, ne faisons pas marche arrière sous prétexte que ça dérange quelques hommes à l’esprit limité, obscurci non par l’alcool (interdit) mais par une drogue quelconque et que ça contrarie peut-être quelques femmes… inqualifiables.
Je refais ma déclaration de foi laïque :
“Je crois en la liberté de conscience, je ne place aucune opinion au-dessus des autres, que ce soit la religion : catholique, musulmane, protestante, l’agnosticisme, l’athéisme, je crois en l’égalité républicaine ainsi construite même si certains veulent me faire changer d’avis.. Je crois en la liberté de chacun qui est respectueuse de celle de l’autre. Je veux continuer à croire, même si c’est très difficile, en la bonté et en l’intelligence humaine.”
La seule idée qui me motive est celle de la liberté individuelle, revendiquée et respectée, celle des autres et la mienne (oserai-je dire, surtout la mienne ?).