Prendre le mors aux dents

Prendre le mors aux dents, là, il est encore question de liberté : liberté de choisir sa vie.

Vous avez assimilé des tas d’idées pour être heureux, vous vous êtes enfin compris, vous avez réussi à remonter la pente quand vous aviez un coup de blues, vous arrivez à vivre un peu plus pour vous, et un peu moins pour et par les autres, vous savez dire ce que vous voulez, mais en face on ne vous entend pas, en face on ne répond pas… Que faire ?

Longtemps, vous arrivez à oublier cette incompréhension et vous avancez droit dans vos bottes, brave petit soldat. Et un jour, ça vous pèse trop, à nouveau. Un petit coup de blues, des épisodes de nostalgie et hop, on révise, on va relire l’article “estime de soi” (5 février 2011) et on continue.

Si l’autre ne répond toujours pas, ce n’est peut-être pas parce qu’il ne vous accorde aucun intérêt mais simplement qu’il a d’autres intérêts, souvent lui-même exclusivement, l’égoïsme est le problème essentiel.

On peut ajouter que certaines personnes veulent rester fidèles à leurs idées, à leur façon de vivre, à elles-mêmes et qu’elles se complaisent dans le mensonge et l’hypocrisie ; elles le nient ; c’est tellement plus facile de ne jamais se remettre en cause.

En plus, si pendant longtemps, vous n’avez pas osé vous manifester, c’est-à-dire que vous n’avez pas osé vous exprimer clairement, sans crier, sans hargne, sans colère, de peur qu’on ne vous quitte, qu’on ne vous aime plus, commencer à vous faire entendre va casser le rythme. On ne vous comprendra plus, mais on ne partira pas, on vous mettra la faute sur le dos jusqu’à vous accuser délibérément des travers que vous n’avez jamais eu. Là, je parle en connaissance de cause, je viens de m’entendre dire que j’avais oublié une information essentielle. Je n’ai pas crié, j’ai juste constaté un fait de plus de trente ans. Je ne développe pas davantage, ça n’en vaut pas la peine.

J’ai admis, enfin, que l’incompréhension ou le refus de l’autre ne m’enlève pas le droit d’avoir des désirs, de les exprimer et à terme, de les réaliser.

Personne ne peut m’empêcher de dire la vérité, même si l’autre veut la travestir, dans certains cas, c’est impossible : il y a des témoins et une seule vérité claire, nette, précise.

Je ne dois plus attendre  de recevoir ce que l’autre n’est pas capable de me donner. J’ai oublié de vivre pour moi, je vais y penser et le faire ! Au plus tôt !

Pourquoi donc titrer “prendre le mors aux dents” ? Parce que j’aime les expressions et que celle-là convient dans sa deuxième acception. Je m’explique.

Prendre le mors aux dents, c’est : soit se laisser aller à la colère, soit se mettre soudainement et avec énergie à un travail, à   une entreprise…

Le sens initial de cette expression vient du monde équestre. Le mors est un élément du harnais, une pièce qui traverse la bouche du cheval, qui repose sur une zone édentée à l’arrière de la mâchoire, et qui sert à le diriger. Si jamais le cheval prend le mors aux dents, c’est-à-dire si cette pièce s’avance au-dessus des dents, il devient impossible de diriger l’animal qui s’emballe. Autrement dit, ” le mors aux dents” a d’abord été le symbole de l’emballement.

Le deuxième sens de l’expression vient d’une autre manière de voir la chose : si le cheval prend le mors aux dents, il peut en faire complètement à sa tête et en quelque sorte décider de son sort. Il prend  une nouvelle bonne résolution et s’y tient.

Pour moi, elle confirme l’existence de la liberté d’action. Ca me rassure. Pas vous ?

Share

Le vrai goût de la liberté

Je lâche le rouge un moment. Ca fait un peu poivrote d’écrire ça mais j’assume, moi qui carbure plutôt à l’eau et au coca. Et même que maintenant je vais chanter avec Boris Vian :

Je bois

N’importe quel jaja

Pourvu qu’il fasse ses douze degrés cinq

je bois

La pire des vinasses

C’est dégueulasse, mais ça fait passer l’temps.

(Boris Vian, Je bois,)

Drôle de vie ! Ah, ces artistes !

J’ai retrouvé un poème sans ponctuation ou presque. dont l’auteur est Boris Vian. Encore un que j’aime comme Baudelaire ou Roda-Gil. Vian : bizarre, créatif, poète…

Voilà les vers (pas verts, ni verres du jour)

L’évadé ou le temps de vivre, ou encore un vrai goût de liberté.

L’évadé
Il a dévalé la colline
Ses pieds faisaient rouler des pierres
Là-haut, entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait l’odeur des arbres
De tout son corps comme une forge
La lumière l’accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons d’acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l’eau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie, il a bu
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il s’est relevé pour sauter
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L’a foudroyé sur l’autre rive
Le sang et l’eau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps de rire aux assassins
Le temps d’atteindre l’autre rive
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.

 

Boris VIAN, Chansons et poèmes

Ce poème “Le temps de vivre” a été écrit, tout comme « Le déserteur », bien plus connu, en février 1954. Le thème de ces deux textes se rapproche d’un autre poème écrit en 1952 : “Je voudrais pas crever”, publié à titre posthume, en 1962  et chanté par Serge Reggiani.  Cliquez sur le titre, au dessus  (J’écoute, et ça y est : des larmes, toujours).

Les idées exprimées par Boris Vian dans ces trois poèmes (tous les trois ont été mis en musique) tournent autour des plaisirs simples (boire à ce ruisseau), plus exotiques (voir les singes à cul nu dévoreurs de tropiques) ou même quelquefois plus étranges (les coinstots bizarres) que l’on peut trouver à vivre, et de l’inéluctable condamnation à mort, naturelle ou plus ou moins violente et à plus ou moins brève échéance..

Il faut se souvenir que Boris Vian, comme bon nombre de ses contemporains, était antimilitariste ; c’était tout juste après le Deuxième guerre Mondiale, pendant la guerre d’Indochine, au moment des guerres d’indépendance (Maroc, Tunisie et Algérie, la plus terrible des trois). Savoir ce qui s’était passé en Allemagne, en Pologne, au Japon et un peu partout à travers le monde avait rendu pacifiste une grande partie de la jeunesse.

Le Carpe Diem des latins, repris par Ronsard, est une nouvelle fois mis en exergue : la vie est un bien précieux qui peut nous être enlevé à tout instant, il faut donc profiter au mieux que chaque petit détail : un sourire, un rayon de soleil, une main tendue.

Boris Vian savait-il qu’il était malade ? Sans aucun doute. C’est pour cette raison qu’il nous encourage à profiter de l’instant présent et à nous révolter contre l’ordre établi. Si les gouvernants ainsi que leurs représentants détiennent le droit de vie et de mort sur la population, chaque citoyen peut se rebeller : déserter, s’évader au propre et au figuré.

Nous avons conscience que nous sommes tous condamnés à mort à plus ou moins long terme mais nous n’avons pas forcément conscience de la brièveté potentielle de certaines vies et de la fulgurance de la fin, inattendue ou non avec un départ immédiat ou différé. Ce qui compte, c’est d’avoir le temps d’accomplir ce que l’on souhaite et de profiter un peu de la vie. Sans brûler la chandelle par les deux bouts, il ne faut pas remettre au lendemain le bonheur qui peut se saisir maintenant. Carpe diem !

Le personnage de ce poème peut être un évadé de guerre, un prisonnier de droit commun, un prisonnier politique, un petit voyou et pourquoi pas un tueur ? La peine de mort était toujours en vigueur en ce temps-là et on peut donc imaginer que l’évadé était condamné à mort, à perpétuité ou du moins à une lourde peine (on était bien généreux en condamnation à cette époque). L’évadé a conscience que, de toute façon, maintenant qu’il s’est échappé il va mourir. Pour une peccadille, il pourrait s’arrêter de fuir, de courir, mais si on le rattrape la peine va croître, alors quitte à mourir, autant mourir heureux, en liberté. Mourir en prison, en attendant dans le couloir ou l’antichambre de la mort, ou mourir en s’échappant, le choix est vite fait.

La liberté, liberté d’aller et venir, de courir, de ne pas être enfermé, de pouvoir faire ce que l’on souhaite, des petites choses toutes simples (courir, regarder, respirer , boire l’eau du ruisseau), cette liberté là n’a pas de prix. Je suis prêt à sacrifier ma vie pour être libre, c’est ce que disent l’évadé et le déserteur qui ne se battront même pas et attendront la balle funeste qui mettra fin à leur vie.

Quand on sait que la fin est proche, le goût est plus intense.

 

Share

Tu vivras tant qu’on t’aimera

Cliquez sur Paroles Serge Reggiani  pour entendre la voix de ce grand monsieur.

Bon, je ne sais pas faire les éloges funèbres mais une dame que j’aimais, loin de moi, vient de nous quitter et j’ai le coeur tout déchiré. Je pense à elle et à ses enfants. Elle laisse de belles traces.

Paroles Serge Reggiani

Tu vivras tant qu’on t’aimera

Comment faire pour traverser la nuit des temps

Pour que pendant longtemps, longtemps
On t’aime encore, on t’aime autant
Comment faire pour mériter un long amour
Pour qu’on se rappelle toujours
Que tu as existé un jour

Cela dépend de toi
D’être éternel ou pas…

La fin du monde, et pourquoi
Si tu as su te faire aimer de ci et de là
Des Noirs, des Bleus, des Rouges, et caetera
Tu vivras tant qu’on t’aimera, qu’on t’aimera
Tant qu’une femme parlera
Tant que quelqu’un se souviendra
Du seul nom de toi
Une petite flamme s’allumera
Tu vivras tant qu’on t’aimera
Qu’on t’aimera

Si un jour quelqu’un te dit que je suis mort
Ne le crois pas ce croque-mort
Mais aime-moi un peu plus fort
Ton amour, j’en aurai ce jour-là besoin
Bien plus encore que de chagrins
Bien plus encore que ce matin

Cela dépend de toi
Que je survive ou pas…

La fin du monde et pourquoi
La fin de tout, de mes amours et la fin de moi
Ce n’est pas dans la tombe qu’on la verra
Je vivrai tant qu’on m’aimera
Qu’on m’aimera
Tant que ton âme chantera
Pour éclairer un souvenir
Un instant de moi
Une petite flamme s’allumera
Je vivrai tant que tu m’aimeras
Que tu vivras pour moi…

Share

Petits règlements de comptes en famille

Il est normal, habituel au sein d’une famille de s’aimer les uns les autres. Normal mais pas universel.

Quand nous aimons quelqu’un, un enfant surtout, le moindre de ses gestes, de ses regards, la moindre de ses paroles prend une importance considérable. Plus nous aimons, plus nous nous inquiétons, plus nous attachons de l’importance aux mots, aux actes, aux gestes. Plus nous aimons, plus nous nous y accrochons à ces mots, ces actes, ces gestes.  Nous analysons, nous réfléchissons, nous craignons et nous souffrons. Difficile de prendre du recul avec l’amour, l’affection, l’attachement.

Et tout ça commence au berceau. Nous nous construisons petit à petit avec nos frustrations, nos manques, les ratés de la vie, les loupés des parents, avec ce que l’on reçoit bien sûr, mais plus encore avec ce dont on a été privé : l’amour, l’attention, la tendresse. L’absence d’un parent prend une place énorme que l’on compense comme on peut. Pour le coup, je sais de quoi je parle, mon père est mort avant ma naissance.

Est-ce que les bébés comprennent tout ?  In utero déjà ? Personne ne le sait vraiment. Moi j’ai tendance à dire : “oui.” J’ai dû ressentir le chagrin de ma mère quand elle m’attendait. Les larmes d’une femme enceinte, est-ce bon pour le bébé ? Et ses angoisses après ? Plus tard, ma mère s’est remariée. J’étais ravie. J’ai eu un frère et une sœur mais cette impression d’être de trop m’a poursuivie.  Bien sûr, je sais qu’il y a tellement pire que le manque quand je lis ou que j’entends les horreurs de la violence ou surtout celles de l’inceste, mais quand même…

Comment trimballer un boulet ? Certains se résignent, moi je me suis révoltée. Depuis toujours ! Comme ce que je voulais était impossible, je me suis fabriqué un monde à moi, à la fois trop beau pour être vrai et en même temps si cruel qu’il fallait que je me batte pour survivre, en me racontant des histoires au début, jusqu’à  l’âge de cinq ans à peu près, quand ma sœur est née. Là, je rentrais dans la normalité. Je le croyais.

Puis je suis devenue adolescente et c’était mai 68. J’ai réclamé (en quelque sorte) mon dû : la liberté, la liberté de parler. Jusqu’à cette date, pas trop facile de parler à table, et encore moins de se mêler des affaires des grandes personnes. J’ai voulu changer le monde, celui dans lequel je vivais, repousser les frontières, les frontières sociales dans un premier temps. Je ne resterai pas dans mon quartier ouvrier. Je ne le renie pas, j’y retourne encore mais je ne voulais pas rêver petit. Et j’ai continué à rêver mais en faisant le maximum pour donner de la réalité à mes rêves. Prétentieuse, orgueilleuse, ambitieuse, m’a-t-on dit.  Je voulais tant de choses. Je voulais voyager, je l’ai fait…

Pourtant se battre tout le temps est épuisant. A certains moments, on se laisse emporter par le courant de la vie. Je n’avais pas vraiment d’objectifs précis et je me suis adaptée aux événements. Je crois que c’est l’adaptabilité qui sauve de tout.

J’ai bien essayé de réclamer, d’expliquer ce que j’attendais, mais il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre. J’ai crié pour qu’on m’entende mieux. Je me suis mise en colère, ce qui ne sert à rien.  Il faut régler ses comptes avec soi-même avant de crier. Chez moi, le besoin de confrontation était aussi un moyen de tester ma force (de caractère), d’affirmer mon existence. J’aurais voulu régler mes comptes avec ma mère, puis avec tout le monde, expliquer, comprendre et faire la paix, faire table rase du passé. Impossible. Illusion. Illuminée que j’étais.

Les parents parfaits n’existent pas. Nous devons faire notre vie sans eux, loin d’eux. J’ai mis dix mille kilomètres entre ma mère et moi. Le courage de fuir ?

Alors au lieu de toujours résister, j’ai fini par accepter. J’avais enfin grandi. Non, non, pas vieilli : grandi ! Ce que je n’ai pas eu, ce qui n’est pas arrivé, j’ai fait une croix dessus. Ie n’ai pas dit “adieu les rêves”, j’ai dit “bonjour” à d’autres, sans doute. Il y a tant d’autres choses plaisantes autour de moi. Cette soif d’amour inextinguible pouvait s’étancher ailleurs que là où je voulais. J’ai réussi à faire le deuil de cet amour impossible. Peut-être qu’elle m’aimait, ma mère, et qu’elle ne savait pas me le dire ? Mais non, je n’y crois guère et surtout je n’y crois plus. Je ne me raconte plus d’histoires. Au fond, la chance c’est que c’est ma mère, elle-même, qui m’a libérée. Sans le savoir ? Je voulais lui plaire. Rien ne lui convenait. J’ai enfin compris : “Si tu te forces pour être quelqu’un d’autre, qui sera toi ?” (dicton russe).

Au fond, j’ai de la chance ! La chance d’être rebelle et de ne pas écouter les bons conseils basés sur des sentiments mielleux et hypocrites. J’ai regardé la vérité en face. Ca fait mal un temps et puis ça passe.

Les cicatrices ne sont pas douloureuses à plein temps.

Pas vrai ?

Share

Le devoir de vérité

Ai-je le droit de mentir, de me taire ou dois-je toujours dire la vérité ?

Il y a deux jours je réfléchissais sur le droit ou le devoir de se taire. Ce n’est pas simple.

Dans la revue Les Temps Modernes, Jean-Paul Sartre souligne le devoir de vérité de l’écrivain qui se doit de dénoncer tout scandale qu’il connait au point que le silence est une sorte de complicité du crime : “L’écrivain est en situation dans son époque : chaque parole a des retentissements. Chaque silence aussi. Je tiens Flaubert et Goncourt pour responsables de la répression qui suivit la Commune parce qu’ils n’ont pas écrit une ligne pour l’empêcher. Ce n’était pas leur affaire dira-t-on ? Mais le procès de Calas, était-ce l’affaire de Voltaire ? La condamnation de Dreyfus, était-ce l’affaire de Zola ? L’administration du Congo, était-ce l’affaire de Gide ? Chacun de ces auteurs, en une circonstance particulière de sa vie, a mesuré sa responsabilité d’écrivain.” (Situations)

Il est de la responsabilité, du devoir de l’écrivain de dire la vérité quand il la connait. C’est encore plus vrai, plus indispensable de la part du journaliste : il doit dire la vérité, ne pas la déformer non plus.

Que penser des medias qui se déchainent sur tel ou tel sujet ? Ils sont tous si dépendants de leurs lecteurs et des politiques que bien souvent, ils ne disent que ce qu’on veut entendre ou que ce qu’on leur dit de dire. Medias pour pleurer, medias pour rêver, medias pour casser… Quand donc des medias pour dire la vraie vérité ? Chaque fois, je pense à la Pravda, tu parles d’une vérité à cette époque, dans le même temps Soljenitsyne était au Goulag.

Que sont devenus les Gide, Zola et Voltaire ? Ont-ils été bâillonnés par le pouvoir ou se sont-ils autocensurés ?

Dire est un devoir absolu de l’homme envers chacun, si grave soit le préjudice qui peut en résulter pour lui. Ne pas dire la vérité est une lâcheté et la dire une forme de courage. Adieu les petits singes de la sagesse asiatique !

Mais que faire quand vous dites la vérité et que personne ne veut l’entendre ?

Les officiels à qui vous racontez un abus sur mineur vous renvoient en disant que ce n’est pas de votre ressort. Vous n’êtes pas concernés. Ah ? Ce n’est pas votre famille, ni votre travail, même pas votre responsabilité. Vous cherchez tous les moyens de vous faire entendre, puis  vous finissez par lâchement baisser les bras. Trop lourd, trop long, sans suite…

Quand c’est un secret de famille que vous découvrez, vous l’évoquez, vous voulez le révéler, on vous fait taire. Vous êtes seul, vous vous taisez. Et un jour, le secret apparaît au grand jour, comme si la vérité avait des moments pour être connue. Oui, il y a des moments plus propices. Pour quoi ? Pour qui ?

La vérité est ou elle n’est pas. Quand elle fait souffrir avec des conséquences irrémédiables, peut-être faut-il la taire mais quand elle n’est que question de confort pour quelques-uns et qu’il n’y a pas de honte, pourquoi se taire ? Pourquoi faire taire ?

Je pense à l’histoire de François Mitterrand et de Mazarine : un secret de Polichinelle mais un secret quand même. Tonton mort, Mazarine apparaît dans la lumière. Combien d’enfants cachés ? Pourquoi leur laisser ce poids ?

Pour l’image des coupables ? Et après ?

C’est vrai que dans une démocratie, tu peux te moquer des vivants, pas des morts. Et ceux qui restent, qu’en penser ? Ont-ils été complices du silence ? Pourquoi ? Est-ce glorieux ?

Share

Le jour où je me suis aimé pour de vrai

Si vous retournez à mes premiers articles de 2011, je “dissertais” sur l’estime de soi et sur bien d’autres choses. Je crois que la douleur transpirait. Je me libérais. Le temps a passé. J’ai maintenant envie de parler pour aider ceux qui se sentent coincés. Et le hasard fait bien les choses. Dans le blog de La Vieille Marmotte, j’ai trouvé ce texte de Charlie Chaplin qui m’a “parlé” : comment grandir à peu de frais, car finalement tout ne tient qu’à soi.

Je n’ai pas changé un seul mot, juste les caractères d’imprimerie, le format des paragraphes et la photo.

**********

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris qu’en toutes circonstances j’étais à la bonne place, au bon moment. Et alors, j’ai pu me relaxer.

Aujourd’hui je sais que cela s’appelle… l’Estime de soi.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai pu percevoir que mon anxiété et ma souffrance émotionnelle n’étaient rien d’autre qu’un signal lorsque je vais à l’encontre de mes convictions.

Aujourd’hui je sais que cela s’appelle… l’Authenticité.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de vouloir une vie différente et j’ai commencé à voir que tout ce qui m’arrive contribue à ma croissance personnelle. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… la Maturité.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai commencé à percevoir l’abus dans le fait de forcer une situation ou une personne, dans le seul but d’obtenir ce que je veux, sachant très bien que ni la personne ni moi-même ne sommes prêts et que ce n’est pas le moment… Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… le Respect.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai commencé à me libérer de tout ce qui n’était pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon énergie. Au début, ma raison appelait cela de l’égoïsme. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… l’Amour propre.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé d’avoir peur du temps libre et j’ai arrêté de faire de grands plans, j’ai abandonné les méga-projets du futur.

Aujourd’hui, je fais ce qui est correct, ce que j’aime, quand cela me plait et à mon rythme. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… la Simplicité.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de chercher à avoir toujours raison, et je me suis rendu compte de toutes les fois où je me suis trompé.

Aujourd’hui, j’ai découvert… l’Humilité.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de revivre le passé et de me préoccuper de l’avenir. Aujourd’hui, je vis au présent, là où toute la vie se passe.

Aujourd’hui, je vis une seule journée à la fois. Et cela s’appelle… la Plénitude.

Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris que ma tête pouvait me tromper et me décevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur,  elle devient une alliée très précieuse ! Tout ceci, c’est… le Savoir vivre.

Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter, du chaos naissent les étoiles.

Charlie Chaplin


Share

Droit et devoir de taire la vérité

Enrichi de références littéraires justes, ce livre résonne, toujours aujourd’hui, d’un écho singulier, puisqu’il renvoie aux responsabilités de l’individu face aux injustices qui l’entourent.Certains ferment les yeux, d’autres non.Injustices ? Pas vues ?

*******************

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, celui qui cachait un Juif ou un résistant n’avisait  pas la Gestapo. Mal lui en aurait pris. Il le cachait. C’est tout. C’était un devoir de se taire pour celui qui (le) cachait. Combien l’ont fait ? Qu’auriez-vous fait ? C’est facile, après, de penser être un héros.

Voilà le décor du Vercors : forêts, falaises, et grottes nombreuses

Je viens de Grenoble, le maquis du Vercors n’était pas loin et les histoires de guerre, de résistants, de rafles, de collabos ont rempli ma jeunesse. Et ma grand-mère m’en parlait, elle parlait pour que je n’oublie pas.

Nous éprouvons aujourd’hui du respect pour tous ceux qui se sont tus, torturés par des nazis, en France, comme le docteur Valois à Grenoble.

Les autres, ailleurs, on en parle moins, comme si ça ne nous regardait pas , on sait qu’ il y a eu le Goulag, le régime franquiste, la place Tien An Men, la Birmanie, j’oublie Pinochet et les autres… Le prisonnier torturé qui refuse de livrer ses amis, qui se tait sous la torture, nous pensons qu’il est courageux, qu’il fait son devoir en se taisant. Personne ne lui reprochera un mensonge par omission. Parler, se taire ? Que feriez-vous si c’était vous ? Y avez-vous déjà pensé ?

Se taire, c’est parfois prendre le risque d’affronter la torture et la mort mais c’est aussi, quelquefois, se protéger lâchement et se faire complice d’un crime, d’une mauvaise action. L’Eglise tait des secrets comme on le fait dans la Mafia qui est une grande famille : l’omerta, c’est ça. Pas très catholique, non ?

Il est même de nombreuses professions où l’obligation de se taire est un devoir absolu auquel on ne saurait déroger : le secret professionnel.  Deux catégories retiennent mon attention : médecin et secret médical, prêtre et secret de la confession (même si on lui avoue un crime ! ?).

Outre ce secret professionnel qui interdit de dévoiler à des tiers les aveux faits dans l’intimité du cabinet médical ou du confessionnal, se pose au médecin la question de dire ou non la vérité au patient. Le mensonge par omission à celui qui va mourir : cas de conscience du médecin, des soignants et de la famille. Faut-il dire la vérité ? Si oui, qui,  quand et comment ? Infliger la torture du désespoir ? Donner un dernier coup de fouet au malade pour qu’il lutte une dernière fois ? Tout dépend des circonstances, du médecin, du malade et de sa famille. Je peux affirmer que (j’ai des témoins) des médecins m’ont annoncé ma fin prochaine, il y a bientôt quatre ans, sans aucun ménagement, comme si j’étais un morceau de viande sans cervelle. Et je suis là ! Je vous dis : rebelle. Trompe la mort ? Combien de fois encore ?

Dire la vérité à un mourant qui la réclame et qui est capable de la supporter, c’est sans aucun doute l’aider à mourir dans la lucidité et la dignité, s’il est croyant, c’est en principe un devoir de dire la vérité pour qu’il puisse se préparer à passer de vie à trépas. (Je pense à une dame qui est sur le point de nous quitter et qui a voulu savoir. Elle a toujours été courageuse d’après ce qu’on m’a dit. Je l’ai à peine croisée mais il est des rencontres qui vous marquent. Elle a voulu savoir, ses enfants savent. Ils sont tristes mais l’accompagneront sans mensonge jusqu’au bout.) C’est ce droit à la mort digne pour lequel ma grand-mère a milité.

Le Christ et Socrate ont supporté la vérité de leur fin imminente, et dans quelles douleurs , mais ils l’avaient choisie, encore que ça puisse se discuter pour Jésus : il était l’Elu. Nous ne sommes pas le Christ ou Socrate. Nous avons peur, peur de voir mourir l’autre et peur de mourir. Alors que faire ? Dire ou ne pas dire ? Là est la question ?

En dehors de la question des mourants, que faut-il dire ou taire ?

Que faire quand on sait que quelqu’un est en danger ? Il y a devoir d’assistance à la personne en danger. Alors se taire ? Le prisonnier torturé par les officiels ? Le taire ? Les enfants battus par leurs parents ? Les fillettes violées par leur père ou un étranger ? Les travailleurs exploités ? Et l’animal martyrisé par son maître ? Se taire ? Et l’assassin qui se cache ?  Dans un autre registre, le voisin qui cultive du zamal (marijuana) ? Et celui qui truande la Sécurité Sociale , les ASSEDIC, le Trésor Public ? Se taire ? Et nos députés qui s’arrangent avec les indemnités ? Les ministres qui s’octroient des largesses avec les deniers publics ? Complétez la liste vous-même. Se taire ? Le taire ? Que faire ? Comment faire ? Que feriez-vous ? Qu’avez-vous fait ? Que faites-vous ?

Et qui vous entend ?

Yankelevitch a écrit ” Malheur à ceux qui mettent au-dessus de l’amour la vérité criminelle de la délation ! Malheur aux brutes qui disent toujours la vérité ! ” (Traité des vertus, la sincérité.)

Taire, ne pas dénoncer ? La délation est un mot qui horrifie. Personne ne se sent l’âme d’un délateur. Et pourtant… Il y a eu Judas qui a vendu Jésus pour combien d’écus ? Ganelon ? C’est lui qui a causé la perte de Roland à Roncevaux. Et combien d’autres ? Personne ne veut être le traître, il y en a pourtant un de temps en temps. Pourquoi ? Peur, lâcheté, vengeance, naïveté ou conviction.   Ce qui nous intéresse c’est le silence,  taire la vérité, ce qui est peut être mensonge, obéissance et courage. Quoi qu’il en soit, se taire par intérêt n’est jamais moral. On abuse des autres. C’est  de l’égoïsme. De la peur ? Le mensonge politique est égoïsme. Celui qui refuse de dire la vérité parce qu’il a peur de perdre des voix aux élections se sert des autres, de nous, est immoral. Pourtant quelquefois, il est de notre devoir de parler.

Au fond, tout est question de cas particuliers, il nous faut distinguer le juste, l’humain et l’équitable. Il y a des cas de conscience : “Il ne faut pas toujours dire tout, car ce serait sottise ; mais ce qu’on dit, il faut qu’il soit tel qu’on le pense, autrement c’est méchanceté” d’après Montaigne. Dans les “Maximes, pensées et paradoxes” de Rivarol, on peut lire la même idée exprimée différemment « La raison se compose de vérités qu’il faut dire et de vérités qu’il faut taire ».

C’est dire que le droit de se taire n’est bien sûr pas un droit universel. Il est parfois permis de se taire quand on connaît la vérité : pour ne pas nuire. Il n’en reste pas moins vrai que les circonstances de ce droit restent exceptionnelles. Jusqu’où se taire ?

L’idéal reste une société où la vérité serait une valeur unanimement respectée (quelles que soient les conséquences ?). C’est un idéal et n’est-ce pas un ou le suprême mensonge de croire que la vérité est toujours possible ? Utopiste, je vous ai déjà dit.

Je cherche la vérité, partout, dès que je peux. Pour en faire quoi ?

Et vous que faites-vous ?

Share

Connaissance, savoir, culture, vulgarisation…

La vie est courte et la connaissance sans limite.

N’avez-vous jamais peur d’être ignare ?

Moi, si. Vous pouvez vous consoler en vous disant que d’autres sont plus ignorants que vous. Mais moi, la misère de l’autre ne me réconforte jamais. Mon amie Nadine me dit quelquefois : “Malheur des autres ne guérit pas, mais il soulage” (elle dit ça en créole ou, au moins, avec l’accent qui convient et j’avoue que ça me fait du bien… de rire de moi).

Il parait que j’ai toujours le tort de toujours vouloir mieux. Oui, je suis pour l’effort personnel, celui qui aide à se sortir de tout : se sortir de sa peine en travaillant de ses mains pour se fatiguer le corps, et en travaillant de la tête (je n’ai pas dit de devenir fou) pour ne pas penser à ce qui chagrine, pour s’occuper l’esprit. Ma mère et ma grand-mère ont été là avant moi pour me transmettre les douloureuses leçons qu’elles avaient apprises. Je ne m’aventurerai pas aujourd’hui dans la narration de leurs malheurs successifs. Je reste dans mon sujet de l’instant : l’ampleur des connaissances et la brièveté de la vie.

Comment apprendre un maximum en si peu de temps ? Tout savoir, c’est impossible. Juste savoir le maximum. Pourquoi cette faim ou cette soif de savoir ? A quoi bon, me direz-vous, engranger du savoir ? Comme ça… Je ne sais pas. Curiosité. Nécessité d’avoir l’esprit ouvert. Reliefs du siècle des Lumières, de cette époque où l’on rêvait d’une république du mérite , du savoir ? Epoque où l’on était curieux de tout ? Avidité ?

Etre un “honnête homme” selon le sens de l’époque n’empêche nullement d’être honnête au sens actuel du terme. Il paraît que j’ai un problème de rigueur morale trop intense, pour moi encore plus que pour les autres, ce qui est l’inverse du modèle courant où l’habitude de se pardonner prédomine.

Je veux désobéir à Rousseau qui a écrit “Croyez-moi, mère judicieuse, ne faites point de votre fille un honnête homme, comme pour donner un démenti à la nature ; faites-en une honnête femme et soyez sûre qu’elle en vaudra mieux pour elle et pour nous.” Je pense être une honnête femme, il n’empêche que je voudrais être un “honnête homme”, (on admirait l’honnête homme mais on se moquait des femmes savantes au XVII°), donc obligée de dire “honnête homme” (de la même manière, certaines sages-femmes sont de sexe masculin). Honnête homme, pas un spécialiste dont les réunions et les réceptions regorgent maintenant, ces connaisseurs, fiers d’eux, imbus de leur science, qui savent tout à propos d’une chose et rien à propos de tout le reste.

L'”honnête homme”, celui que j’aime, comme le disait Montaigne a «la tête bien faite plus que bien pleine». Je l’envie, il fréquente divers milieux, domine un vaste champ de connaissances, possède des lumières sur un grand nombre de sujets, mais surtout n’ennuie personne ; au cours d’une conversation, il rencontre des individus inégalement instruits, il ne se pavane pas, il évite une technicité trop grande et la langue de bois dans son discours. Pour avoir de tels rêves, je suis… anormale, asociale, obsolète… Quelle utopiste surtout ! J’essaie de me faire comprendre quand je parle. Ceux qui brillent aujourd’hui pensent qu’en étant incompréhensibles, ils se montrent savants. Comme personne n’ose poser de questions de peur de passer pour un imbécile, ils sont tranquilles, les spécialistes ! La famille Diafoirus est ressuscitée ! Y a-t-il des dupes ? Faut-il chanter Alleluyah ?

Aie le courage de  te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières. Emmanuel Kant.

Mais qui ose crier la vérité ?

La masse des connaissances est de plus en plus grande ; impossible de tout savoir, sauf un peu de tout sur tout : est-ce satisfaisant ? Peut-être ? Honnête homme = touche-à-tout. Est-ce mieux de savoir beaucoup sur un seul sujet ? Moi, je réponds : non ! Mais l’horreur est réellement là avec le retour des Diafoirus, des Bouvard et des Pécuchet, qui ne savent pas grand chose et/ou n’ont rien compris sur un seul sujet ? Les méfaits de la vulgarisation…

L’honnête homme doit éviter que son adaptation au milieu ne détruise sa propre nature : il lui faut rester naturel, curieux, empêcher sa personnalité de se “pervertir”… Ménager la chèvre et le chou, disait ma grand-mère plus simplement. Je me  triture sans doute trop la cervelle. J’aurais dû faire l’école du cirque : option Funambule ! Clown-funambule ! Tiens, finalement… Un autre rêve ?

J’ai toujours du mal à rester dans le juste milieu parce que la provocation aide à se faire entendre. Je m’en veux. Je voudrais tellement être pondérée parfois.  L’âge m’aide cependant à devenir sage : essayer de se faire entendre en douceur ou laisser tomber quand on sent qu’il n’y a aucun espoir d’évolution…

Je sais bien que personne n’a le temps de tout savoir et que, dans la pratique, nous sommes contraints de choisir entre tel ou tel domaine de connaissance, de la même façon que l’ on écrit ou que l’on parle : un exposé trop court ou point d’exposé du tout ? Je ne veux pas être l’âne de Buridan : de l’eau ou du son ? Par quoi commencer ? Moi, je me dis “Fonce ; commence par un, tu auras l’autre après !” Trop gourmande ? Non !

Ca ne marche pas à tous les coups. J’ai quelque chose, au moins une chose. J’assume mon choix. Je ne me plains pas. Tant pis ;  je préfère mourir de faim après avoir choisi de boire plutôt que de mourir de langueur en n’ayant pas choisi entre la soif et la faim.

Quand l’urgence est là en plus… Je pense aux tours du 11 septembre et à ceux qui ont sauté plutôt que… être brûlé(e)(s), écrasé(e)(s), asphyxié (e)(s)… C’est comme ça : choisir . Il faut choisir plutôt que d’attendre passivement. Pour ceux qui me connaissent, vous souvenez-vous de mes cris contre le médecin qui décidait de mon sort, sans moi ? Mais, vous l’avez compris, je suis une révoltée, c’est ce qui m’a sauvée. La Laponie au lieu de l’hôpital à la Réunion !

Abréger est un mal nécessaire. Combien renoncent à lire mes articles trop longs ? Dommage, j’aimerai tant être lue par un grand nombre…

Celui donc qui veut résumer doit essayer de se tirer le mieux possible d’une tâche qui est bien  souvent mauvaise en elle-même. Il faut apprendre à simplifier sans déformer, garder les à-côtés qui nuancent la réalité mais pas trop pour ne pas s’écarter du sujet.

Tâche ardue s’il en est… Restituer la vérité, non pas toute la vérité ce qui est incompatible avec la brièveté, mais restituer la vérité au mieux ; ceci est considérablement “plus meilleur” que les approximations qui sont monnaie courante dans le monde actuel.

L’accès au savoir  et à l’information pour tous ? La question est : quel savoir ? quelle information ?

Share

Photographies… un problème avec soi-même ?

 

Comme tout le monde, de temps en temps, je me dis qu’il est indispensable de faire du rangement. Je voudrais savoir combien nous sommes ou plutôt combien vous êtes à tout tenir à jour, en ordre, rangé, propre. A moins de ne pas vivre dans son logement, difficile d’être au top partout. Il y a autre chose que le ménage, l’astiquage, le dépoussiérage, le “rangeage”… Alors j’avoue que chez moi, c’est un peu (beaucoup ?) la pagaille. Il faudrait simplement trier et jeter mais je me laisse déborder, aujourd’hui plus qu’hier… et bien moins que demain ? Dans ce cas, ça craint.

Aujourd’hui donc, j’ai décidé de ranger et de jeter. Sauf que…  je m’arrête de temps en temps. Je me laisse distraire par un courrier que je relis, un article de magazine que je redécouvre. Je papillonne.

Il faudrait ne pas se poser de questions, jeter, voire brûler pour ne pas retourner, soudain prise de remords, fouiller dans la poubelle pour sauver in extremis la chose inutilisée depuis dix ans mais qui va vous manquer le lendemain c’est sûr. Si vous n’avez jamais vécu cela, c’est soit que vous ne rangez jamais, soit que vous avez les moyens de renouveler tous vos biens dès qu’ils sont usagés ou même avant. Moi, j’ai été élevée en essayant de “profiter” de mes affaires, c’est-à-dire de les faire durer. Aujourd’hui ce n’est plus comme ça, je l’ai dit  : “génération kleenex”, société de l’éphémère, mais je voudrais savoir combien de quinquagénaires et sexagénaires ont connu cette coutume qui consistait à acheter un vêtement un peu grand pour qu’il fasse profit.

Si vous étiez l’ainé(e) de la famille, vous profitiez d’un vêtement neuf. Les cadets profitaient moins longtemps, mais ils ne portaient  que de l’usagé, à moins que la morphologie de leur aîné(e) ne soit pas compatible avec la leur. Selon les familles, les seconds et nièmes échappaient  plus ou moins aux vêtements de leurs ainés ; moi, de ce côté, j’ai eu beaucoup de chance, j’étais la première. Chance pour ma soeur aussi, elle est née cinq ans après moi, et surtout, elle était rondelette et moi “ficelle” ; aujourd’hui, c’est largement l’inverse, elle est plus que mince et… pas moi. Sans doute que je profite  bien des effets des médicaments que ma grand-mère m’a fait avaler pour que, justement, je “profite”. mieux Mais qu’est-ce que c’était cette répétition, cette volonté de profiter. Génération d’avant et après-guerre ? J’avoue que  je cherche des explications de temps en temps. Je reviendrai sur ce sujet une prochaine fois. Là, je continue avec mon rangement. Enfin, moi et mes digressions, dans tous les domaines !

En rangeant, lecture d’un vieil article de ELLE, et détour par le clavier de l’ordi. C’est pas gagné, la fin du rangement.

Après tout, j’ai le droit de me faire plaisir ; depuis le temps que je vis des contraintes. J’ai le droit de  me faire plaisir. Je me réconcilie avec moi depuis quelques mois même si j’ai encore du mal avec les miroirs. Quant aux photos, ce n’est  toujours pas possible ! Je photographie mais j’essaie d’échapper au(x) photographe(s). Je sais pourquoi cependant j’essaie de voir ce que les “personnes autorisées” (par qui, dirait Coluche) racontent à ce sujet.

Voilà l’article de 2010 (pas si vieux ; je ne vous dirai pas l’âge des doyens des magazines qui viennent de découvrir les joies de la déchèterie). Cet article n’est plus l’original :  caviardé par endroits et étoffé à d’autres. Vous devriez voir les changements de plume.

“Miroir et photo, quelle différence ?”
Devant la glace, soit on s’observe les yeux dans les yeux, soit le regard est dirigé sur une action (se mettre du mascara par exemple) alors qu’une photo est un instantané réducteur, qui fige un moment. On y apparaît dans une posture, avec un angle, des gestes dans lesquels on n’a pas l’habitude de se voir. Il ne faut pas oublier que la photogénie, injuste,  fait de réels cadeaux à certains, alors que, pour d’autres, c’est une sanction. Moi je me demande toujours si je fais partie des sanctionnés ou si je suis aussi moche que ça.

A quoi pense-t-on quand on se voit en photo ?
On commence par  se poser toutes sortes de questions : c’est vraiment moi, ça ? Comment suis-je par rapport aux autres ? Et surtout dans l’oeil des autres ? … Cela ramène à notre façon d’être avec les autres ; selon que l’on est au travail, avec des amis ou en famille, on se montre sous des angles différents.

La photo devient un outil d’investigation de soi-même. Tout dépend du degré d’exigence que l’on a envers soi et  envers les autres. Image quand tu nous tiens ! Les plus soucieux de leur apparence savent qu’ils ont les moyens d’être mieux, en faisant un régime, en allant chez le dermato, en changeant leur couleur de cheveux… Ils se voient comme une pâte à modeler. Notre époque nous a apporté l’idée que l’on peut, et même que l’on doit, s’améliorer ressembler à la norme imposée : petit nez droit et fin, bouche pulpeuse.  Nous sommes envahis de belles images d’actrices, de mannequins qui travaillent sur leur physique, et on se dit : « Pourquoi pas moi ? » Nous sommes devenus des entrepreneurs de nous-mêmes. D’autres se trouvent “pas si mal” au fond, d’autres “franchement beaux” (si, si, ça existe ; j’en connais des “qui s’aiment”). D’autres enfin, se disent “ce n’est pas possible que ce soit moi, ça”, ils se résignent, baissent les bras,  et pensent qu’il n’y a rien à faire de toutes façons. Alors autant s’oublier.

Ne pas s’aimer en photo, ça veut dire quoi ?
Si l’on « travaille » constamment sur soi-même pour être au mieux, il arrive que la photo mette à mal ces efforts en nous renvoyant une image qui ne nous convient pas. On devient très critique. Ça ne veut pas dire que l’on a forcément une mauvaise estime de soi. On n’est pas  obligatoirement dans le tout ou rien, on peut s’aimer sur un cliché et trouver en même temps qu’on a besoin de changer de look. Le jugement que l’on porte, plus ou moins sévère, montre comment on accepte les choses de la vie, à quel point on est ou non en paix avec soi-même. Par exemple, certaines personnes ne veulent plus se faire prendre en photo lorsqu’elles vieillissent car la photo semble une mise en danger.

Mais ceux qui ne s’aiment vraiment pas,  ceux qui préfèrent s’oublier, ceux-là vivent ou essaient de vivre avec eux-mêmes, mais sans image d’eux. Ils évitent miroirs et photographes, tels de “purs esprits” (êtres incorporels conscients d’eux-mêmes, de leur existence, doués d’une vie psychique et généralement d’une d’intelligence satisfaisante ainsi que de volonté) : ils se croient “dématérialisés” , ne concédant à leur existence terrestre que le droit de boire et de manger (quelquefois trop ou quelquefois pas du tout). Ils ont souvent l’air de bons vivants, trop enveloppés et rigolards, et/ou tirés à quatre épingles visant la perfection, souvent prêts à rendre service à tout le monde, prêts à aider, à rire, à parler (trop), juste pour qu’on ne voit pas ce qu’il y a à l’intérieur de l’enveloppe dérangeante.

Bisous à toi, ma vieille, vieille amie qui te reconnaîtra. Toi, tu aimes les photos ou tu le laisses croire, mais je connais tes écorchures. Courage à tous ceux qui ont été ou sont encore mal dans leur peau : ça passe, mais il faut faire des efforts sur soi pour y arriver et pour s’aimer chaque jour, en photo ou pour de vrai.

Share