Mesquin et mesquinerie. Pourquoi ces deux mots me viennent-ils à l’esprit ? Simplement parce que mon petit-fils, depuis qu’il est entré au collège à la rentrée de septembre dernier, enrichit son vocabulaire avec une série de mots arabes : miskine est l’un d’eux. J’ai alors pensé que notre mesquin était sans doute issu de l’arabe à moins que ce ne soit l’inverse. L’étymologie de certains mots n’est pas toujours simple mais c’est l’enrichissement réciproque.
Enrichissement de notre langue, c’est bien ça. Faut-il vouloir sauvegarder la pureté de la langue (sachant que le français est le fruit d’une évolution permanente) et, en même temps, favoriser l’éclosion de mots nouveaux ? Comment ne pas créer des mots dans un monde sans cesse en changement : migrations, découvertes… ?
Le mot mesquin semble avoir été emprunté :
- à l’italien meschino : «pauvre, chétif»
- à l’espagnol mezquino «pauvre, indigent»
- tous les deux viennent de l’arabe miskin «pauvre».
Aujourd’hui le mot miskine utilisé par les plus jeunes nous vient de l’arabe miskīn, son sens originel est oublié, il est désormais utilisé pour exprimer son mépris envers une personne, la désigner comme une personne pitoyable ou pathétique. Si à l’origine, miskine exprimait la sollicitude, il est devenu moqueur et négatif aujourd’hui. Ce mot s’utilise souvent en début de phrase : “Miskine, t’es vraiment ridicule avec ces habits !”
Je me suis souvenue de ma prof de français préférée, inoubliable, celle que j’ai eu en sixième et cinquième, celle qui m’a fait aimer le latin, le grec et découvrir le français (oui découvrir est le verbe qui convient). D’autres enseignantes m’ont intéressée mais mon cœur é été conquis à jamais par cette Jeannine (avec deux N insistait-elle) Marty. Ah les souvenirs d’enfance !
En sixième, nous avions travaillé sur les mots d’origine étrangère. L’exercice avait porté sur : vasistas (d’origine allemande : was ist das?), peccadille (espagnol : pecadillo), babiole (italien : babbeo «niais, nigaud») et bien plus, des mots d’origine arabe commençant par al (algèbre, alcool alchimie ou alambic). D’autres mots carrément alllemands comme bretzel, diktat, ersatz, kitsch, avec pour chacun d’eux une anecdote inoubliable ; la preuve, je m’en souviens encore Il y avait eu même du japonais : geisha, mikado et mousmé.
D’autres mots arabes qui semblent maintenant bien français:
- Café : de l’italien caffè que l’on remplace quelquefois par caoua, cahoua ou kawa lui-même emprunté à l’arabe qahwa qui signifiait initialement « liqueur apéritive » mais qui, au XIXe siècle, a été utilisé par les soldats français en Algérie.
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Chiffre et zéro : le chiffre zéro fut nommé par les Arabes sifr signifiant « vide, néant ». Par l’intermédiaire du latin médiéval, sifr est devenu en français chiffre, désignant d’abord le zéro, puis toutes les figures du système numérique arabe. Pour nommer une valeur nulle, chiffre fut alors remplacé par zéro, venu aussi de sifr par l’italien zefiro, contracté en zero.
- Hasard : « Un coup de dés jamais n’abolira le hasard », a écrit le poète Mallarmé. Or, hasard a été emprunté par l’espagnol azar à l’arabe az-zahr « jeu de dés ».
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Matelas est une altération de materas, nom probablement emprunté au XIIIe siècle à l’italien materasso « grand coussin pour garnir le lit », probablement arabe aussi.
- Mousson, vent tropical saisonnier évoque l’Asie doit pourtant son nom à l’arabe mausim, saison
- Nénuphar : ninufar en arabe ; le ph provient uniquement de l’influence du grec nymphea désignant la même plante.
Je termine avec le mesquin du début.
Mesquin en français est celui qui s’attache à ce qui est petit, médiocre, aux détails infimes sans considération de l’ensemble ; qui manque de grandeur, d’élévation, de générosité. On pourrait donner comme synonymes : bas, borné, étroit, médiocre. Le contraire de généreux, noble.
Mesquin peut qualifier aussi quelqu’un qui fait preuve d’une parcimonie excessive, compte tenu de ses moyens, de sa qualité ou qui s’attache bassement aux intérêts matériels. On peut parler de cadeau mesquin, économie mesquine, intérêts ou profits mesquins.
Il existe un adverbe : mesquinement, pour qualifier une manière d’agir mesquine et malheureusement, il semble que notre époque soit de plus en plus propice à ce type de comportement bas avec cette pointe de malveillance dont tous se défendent bien sûr, mais dont quelques constats prouvent l’existence réelle.
Malheureusement, l’hypocrisie et les hypocrites (tartuffes ou pharisiens) semblent avoir de beaux jours devant eux.
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Un petit plus en pensant à Giédré (clic), la compagne de Pierre-Emmanuel Barré .
Passionnant de retrouver l’ origine des mots, comme tout ce qui force à réfléchir !
Mais je ne comprends pas que l’ espéranto n’ait jamais été imposé dans le monde entier !
Je pense au latin qui permettait à tous les chrétiens de participer à la messe dans le monde entier !
Bonne journée Françoise
Bisous