À La Réunion, élèves et professeurs sont rentrés depuis quelques jours déjà ; en métropole c’est pour bientôt, la semaine prochaine les vacances seront bel et bien terminées. Les enseignants reprenant le chemin des classes, je pense à ceux qui furent mes collègues. Je vous ai déjà dit qu’après un passage par l’entreprise privée, je suis allée travailler dans le milieu qui fut celui de mes rêves d’enfant : l’enseignement. Toute petite, je rêvais d’être institutrice, de préférence dans une classe de C.P., celle qui doit donner le plus de satisfaction car c’est l’année de la découverte de la lecture. Ensuite j’ai rêvé d’être prof d’histoire (avec géo, c’est le lot obligatoire : histoire-géo) mais on m’a dit “l’enseignement c’est bouché.” J’ai fait d’autres choix (un peu au hasard) : je suis devenue comptable avec un bac philo bien classique. Un jour quand même, je suis revenue à mes premières amours et j’ai passé le concours de recrutement des profs.
Pourquoi ?
POUR LES VACANCES. Mais oui, les vacances. Parce que je venais d’avoir un enfant et que pour être un maximum de temps avec lui elle, l’Éducation Nationale offrait un maximum de congés. Comme je voulais m’occuper de mon enfant, l’enseignement me paraissait vraiment un bon plan. C’était parce que je ne connaissais pas tout le système.
Les salariés qui triment toute l’année pour avoir cinq semaines de vacances envient tous et toujours les longues vacances de professeurs MAIS regardons la réalité en face, avec franchise, sincérité.
D’abord, les professeurs ne travaillent pas qu’en classe : chaque soir, ils préparent le lendemain, ils peaufinent leurs cours, corrigent des cahiers ou des copies. et cela peut prendre du temps selon la matière enseignée, le nombre d’élèves et le nombre de classes dont ils ont la charge. Sans compter qu’en dehors de leurs heures de cours, ils rencontrent des parents, discutent avec leurs élèves, vont à des réunions et parfois même participent à des stages ; pas tous certes mais un certain nombre..
Selon la DEPP (pas la fille de Johnny Depp et de Vanessa Paradis), mais la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance [D.E.P.P.], vous connaissez le goût de “la France” pour les acronymes, selon la DEPP donc, les enseignants ont des semaines de 44 heures en moyenne, dont 9 heures 30 à domicile (moins de 2 heures par jour). Je me demandais d’où sortaient ces chiffres et j’ai trouvé ce tableau dans un article du Monde, “Le Monde” du :
Avec environ quarante heures hebdomadaires, on est loin des trente-cinq (35) heures des employés du privé. Attention il s’agit d’une moyenne et c’est ce qui “fausse le résultat” donné au public, il y a les profs de sport, de dessin, de musique, de pratique professionnelle (coiffure ou maçonnerie), de maths, de français, de philo, de droit, d’économie, etc. Les préparations de cours, les corrections, les copies ne sont pas les mêmes et donc les temps de travail à l’extérieur de l’établissement scolaire non plus. Copies en musique, E.P.S., mécanique ? Contenus et temps de correction entre un devoir de maths et une dissertation de philosophie ? Temps de mise à jour d’un cours du programme d’histoire et d’un cours d’économie ou de droit ? C’est un milieu extrêmement différent, varié, le temps moyen n’est qu’un indicateur qui ne signifie pas grand chose, la réalité est trop disparate. Il faudrait faire une étude plus précise par matière enseignée, nombre d’élèves par classes et nombre de classes de niveaux différents). Je me souviens de ma première année d’enseignement (en 1980) : onze classes différentes, trente-six-élèves par classe (soit 396 visages à connaître, presque quatre-cents) et quatre matières à enseigner : comptabilité, droit, économie, C.E.E.J. (Connaissance de l’Environnement Economique et Juridique) à des niveaux variés et dans des “spécialités” différentes.
Le travail des enseignants est exigeant pour plusieurs raisons : d’une part, les classes sont parfois surchargées, plus de trente-cinq élèves, d’autre part, les élèves sont souvent de plus en plus difficiles à tenir et les enseignants n’en sont pas les premiers responsables. Si certains professeurs savent naturellement faire régner le calme, la plupart d’entre eux ne sait pas s’y prendre et n’ont été pas formés à la tenue de classe (qui saurait d’ailleurs transmettre cette compétence ?). Le public change vite : on trouve des sauvageons dans les plus petites classes, dans tous les quartiers, même ceux chics et privilégiés de Paris). Oui, c’est vrai.
Bien pire : les enseignants souffrent très souvent d’un manque de soutien hiérarchique. Un mot d’ordre : “ne rien dire pour ne pas faire de vagues”. Il faut savoir que certains enseignants côtoient la pire racaille (ce ne sont plus des canailles passés un certain seuil), racaille qui bénéficie de la cécité institutionnelle, ne sera pas renvoyée, sortie du système mais sera priée de pourrir l’établissement voisin ; en échange, un autre “désaxé” viendra à sa place, un échange, histoire de calmer les esprits temporairement. Voilà une réalité. Les enseignants en sont donc arrivés à risquer leur vie face à des individus dangereux, les élèves ou leurs familles.
Quelles autres professions courent-elles autant de risques ? Vivent-elles autant de situations difficiles ? Combien de métiers avec autant de “charge mentale” ?
Oui les enseignants attendent les vacances qu’ils ont bien méritées mais ATTENTION, retenez que car tout n’est pas « pure vacance ». Toujours selon la D.E.P.P. , les enseignants passeraient officiellement vingt (20) jours de leurs vacances à travailler pour l’année scolaire qui va commencer ou pour les trimestres suivants : rangement, aménagement de leur classe pour les enseignants du premier degré ; préparation des cours surtout en cas de changement de programmes, de directives ministérielles, de niveaux d’enseignement ; réunions d’équipes ; sans compter tout un tas de joyeusetés administratives…
N’oubliez pas non plus que la profession d’enseignant s’est beaucoup féminisée, donc les salaires ont baissé, et de ce fait, les salaires des enseignants sont loin d’être mirobolants.
Est-ce pire sous ce gouvernement ? Je n’en suis pas sûre. Je ne vis plus les choses de près, pourtant mes anciens collègues me parlent : ils se confient, avouent leur désespoir.
En 1981 a commencé une véritable entreprise de démolition du système. En silence car les enseignants, de gauche majoritairement, n’osaient pas se plaindre et attendaient du mieux. Mais ça ne s’est pas arrangé. La suppression d’heures, d’options, la création de parcours, de filières, de diplômes, sans moyen, j’ai connu ça. Sans compter que la démagogie avait pris le pouvoir : toute une classe d’âge au bac, 80% de réussite… une inflation de diplômes vidés de leur contenu. Voilà la triste vérité.
C’est un grand travail que de remettre le système en place, un système qui ne ferait pas entrer tout le monde dans le même moule mais qui prendrait en compte les capacités et les désirs de chacun. Les notions de mérite et de travail doivent enfin être remises à l’honneur.
S’exprimer pour que le monde s’améliore. Mettre en œuvre les idées en tenant compte des réalités. Nous avons du pain sur la planche.
à contrario, j’ ai dans ma famille deux profs de techno, qui le vendredi à 16h30 mettent les voiles et ne ratent pas un jour de vacance !
J’ ai même appris qu’ un certain luc Ferry touchait de l’ argent pour des cours qu’ il ne donnait pas !
J’ en connais qui reprennent tous les ans les mêmes cours !
Et on peut parfois se dire qu’ on sait pourquoi le bac ne vaut plus rien !
Comme quoi, l’ enseignement n’ est pas un tout, et que s’ il est vrai que celui ou celle qui prend son métier à coeur a beaucoup de pain sur la planche, il est vrai aussi qu’ il y a de plus en plus d’ enseignants qui n’ ont pas la flamme, et démissionnent devant la nouvelle génération et les contradictions des autorités.
J’ ai d’ abord pensé que Blanquer changerait les choses en bien, mais je déchante de plus en plus !
Je te vois bien comme un instituteur que j’ ai eu, que j’ adorais et qui réussissait le tour de force de me faire progresser dans la joie !
Passe une bonne journée Françoise
Bisous
C’est vrai que, pour certains, c’est un véritable sacerdoce mais pour d’autres ça ressemble plus à une occupation lucrative, comme les profs dans les grandes écoles qui font des cours magistraux avec des salaires royaux !!!
Mais je reconnais que celui qui prend vraiment son métier à coeur, ce n’est pas une sinécure, loin de là …
Avec des élèves et leurs parents agressifs, ils vivent quelques fois un véritable calvaire.
Et ceux qui veulent exercer sérieusement ont un sacré travail en amont et en aval !
On ne doit pas faire l’amalgame, là non plus : il y a les bons et les mauvais, comme partout.
En tous cas, de tout coeur avec eux pour cette nouvelle rentrée et, surtout, bonne chance, pour avoir des classes convenables, ce qui est loin d’être le cas, entre le surnombre et les élèves plus que difficiles, souvent incontrôlables !
Bon week end et bon début de mois !
Bisoux, ma françoise ♥
ah les pauvres enseignants, pour qui on avait le plus grand respect dans ma jeunesse, on perdu beaucoup , ballotés entre les programmes qui changent, les ministres qui veulent leur réforme, la suppression des contrats aidés, l’état d’esprit et le non respect des enfants et parents actuels, je les plains, quel courage il faut pour rentrer dans une classe surchargée, avec des élèves indisciplinés ! et la menace des foudres de l’académie, ou des interventions de parents bornés ! chapeau les enseignants ! bon courage pour la nouvelle rentrée, vous avez mon admiration et mon profond respect , bon weekend chere Françoise, bisous
Salut
Je sais que c’est difficile ce métier.
Si on s’en donne la peine on n’a pas beaucoup de temps à soi.
La hiérarchie s’en fout surtout quand on voit les ministres qui se suivent et qui ne pensent qu’à laisser leurs noms sur une loi qui est bien sûr impossible ou difficile à mettre en place.
Lundi mes petits enfants entrent au lycée en se demandant ce qu’ils feraont plus tard. J’en ai une qui veut faire prof de français mais en Suisse.
Bonne semaine