Les premiers masques vénitiens ont été portés dès le XIIIe siècle ; on ne sait pas comment tout a commencé mais les masques étaient incroyablement populaires. Ils étaient portés une bonne partie de l’année et les Vénitiens étaient ainsi autorisés à dissimuler leur visage en public mais les lois sont devenues plus strictes et la durée au cours de laquelle on pouvait porter un masque en public a été raccourcie. Au XVIIIe siècle, ils étaient seulement autorisés durant trois mois de l’année. Je me demande bien pourquoi ce goût de la dissimulation généralisée. J’ai bien mes idées mais ce ne sont que mes explications. Quelle est la réalité ?
Une chose me parait certaine quand toute la ville est déguisée : le vice et la vertu se masquent mieux que jamais. Ne pensez-vous pas cela ?
Je dois vous avouer que je craignais, en arrivant à Venise en cette période de carnaval, de sentir circuler de mauvaises ondes, comme des traces laissées par des aventuriers, occultistes, mécréants en tous genres : Casanova, Cagliostro, le comte de Saint-Germain… Qui d’autre ? Est-ce la protection des cent-vingt et quelques églises parsemées à travers la ville, l’ambiance était plus bonne enfant que sulfureuse. J’ai croisé un très grand nombre de Français (pas très jeunes pour la plupart) qui avaient l’envie de rêver, de vivre une autre vie l’espace d’une semaine.
Je reviens aux masques (je vous rappelle que je n’aime pas les clowns, j’en avais parlé là : coulrophobie et LÀ aussi) mais les masques c’est autre chose. Certes on se cache …
À Venise, la fabrication des masques fut longtemps artisanale ; elle se faisait à partir d’un moule en argile placé dans une boîte en bois dans laquelle on versait du plâtre pour obtenir un moule creux dans lequel on plaçait ensuite de morceaux de papier mâché. Certains masques sont encore fabriqués de cette manière ; c’est un travail très méticuleux : il faut que tous ces morceaux de papier humide s’agglomèrent et présentent une surface lisse quand on les détache du plâtre. Chacun de ces masques blancs reçoit ensuite la couleur et les décorations qui le rendront unique tout comme un visage.
La production artisanale et locale, compte tenu de son coût, est réservée à quelques privilégiés ou à des amateurs éclairés (comme on dit). Les vendeurs à Venise sont nombreux mais je crois que tous les masques que l’on trouve ne sont pas le résultat du travail artisanal. Il s’agit sans aucun doute de production industrielle, italienne peut-être, asiatique sans aucun doute. Voilà deux des nombreux éventaires vus près de la place Saint-Marc : Chez les meilleurs fabricants de masque de Venise, faire un choix est souvent très difficile tant les masques exposés rivalisent en termes de beauté et de qualité mais cet exemplaire unique a un prix qui donne aussi à réfléchir.
Il est bon de savoir qu’il existe des masques “à porter” et des masques uniquement décoratifs à accrocher dans votre salon. Vous pouvez bien évidemment acheter un masque à porter qui soit en même temps décoratif mais vous verrez qu’ils sont néanmoins souvent assez différents.
Alors maintenant je vous en raconte un peu plus. Il existe différentes sortes de masques. Un masque, masculin en français devient “una maschera” (un mot féminin)
1 – Voilà la bauta qui peut être blanc uni ou décoré de mille façons.Destiné aux hommes, le bauta recouvre tout le visage, garantissant à son porteur l’anonymat le plus total. Le menton saillant permet au porteur de parler, de manger et de boire sans avoir à révéler son identité. Le terme « bauta » désigne non seulement le masque, mais aussi le costume complet qui comprend un tricorne et une cape noire. Au XVIIIe siècle, le port de ce masque, ainsi que le costume, étaient obligatoires pour les citoyens lors des prises de décisions politiques. Cela permettait à chacun de demeurer anonyme.
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2 – La moretta ou servetta muta (qui est sombre ou “le serviteur muet”) étaient destinées aux aristocrates ou aux femmes nobles. Ce petit masque noir (de cuir à ses débuts) ne possède aucun trait du visage et n’a pas de bouche non plus. Le masque traditionnel ne tient pas grâce à des sangles mais en retenant un bouton entre les dents, d’où l’impossibilité de parler ce qui ajoutait un peu de mystère supplémentaire.
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3 – La Colombine, souvent appelé “loup”, est un demi-masque, pendant féminin de la bauta. Le masque peut être fixé par un ruban ou tenu par un bâton. Il est possible que la popularité de ce masque soit plus récente, car il n’existe pas de documents historiques ou peintures représentant ce masque durant le carnaval. Aujourd’hui sa forme est extrêmement populaire pour les hommes comme pour les femmes.
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4 – La larva, semblable au masque bauta (larva signifie fantôme), il peut être aussi appelé «molto» (le visage) et recouvre tout le visage, contrairement à la bauta, il n’y a aucun moyen pour le porteur de manger ou de boire lorsqu’il porte ce masque. C’est sans doute le masque le plus connu car il est utilisé aujourd’hui encore par les hommes et les femmes. C’est le masque idéal pour ceux qui souhaitent garder une part de mystère.
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5 – Le Gnaga, demi-masque en forme de chat tire son nom de son du miaulement en dialecte vénitien. Il est traditionnellement porté par les hommes qui veulent s’habiller comme les femmes et il est le fruit d’une singularité du droit vénitien. Nulle personne portant un masque ne pouvait être arrêtée, car elle jouait tout simplement un rôle en conséquence tous ceux qui portaient un masque Gnaga étaient autorisés à siffler et à faire des commentaires obscènes sur les passants, sans être inquiétés par la loi.
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6 – Enfin le Medico della Peste sans doute l’un des masques les plus reconnaissables. Le plus angoissant à mes yeux. Il me rappelle l’affiche du film “Que la fête commence”.
Vous serez peut-être surpris d’apprendre que ce visage obsédant n’a jamais destiné au départ à être un masque de carnaval vénitien. C’était un masque de médecin, conçu au XVIIe siècle en France par Charles de Lome, médecin de son état chargé de traiter des pestiférés. Des verres de protection recouvraient les yeux. et le nez en forme de bec contenait des fleurs séchées, des herbes, des épices, diverses plantes aromatiques destinées à la désinfection en quelque sorte et c’était une idée de premier masque à gaz. Le reste du costume du médecin, que l’on retrouve au carnaval de Venise, servait également de protection contre la maladie : robe, cape et chapeau noirs étaient accompagnés d’un bâton destiné à faire bouger les malades sans les toucher directement.
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7 – Zanni, enfin, est un autre personnage classique de la scène italienne, Zanni est une sorte d’idiot du village. Le front bas représente son manque d’intelligence, à l’instar de son long nez. Attention, il se dit que plus le nez est long, moins le personnage est intelligent…
Maintenant que vous en savez autant que moi sur les masques de Venise, je vous en montre quelques-uns.
En voilà un en dentelle de Burano (j’ai l’impression que c’est du plastique, made in China le plus souvent aujourd’hui) :
En voilà deux autres pleins de plumes,
Quelques autres encore, le choix est si vaste.
Enfin ceux que j’ai achetés pour mes petits-enfants (trois filles et un garçon) ; des Colombines, c’est ça, vous avez retenu ?
Et enfin deux (due molte).
Souvenez-vous : «molto» (le visage). Blancs, simples, à décorer si jamais je repartais pour Venise en costume…
Je l’avoue, l’idée me plait bien.
Merci pour ce super reportage sur les masques.
Le plus horrible est bien celui du médecin de la peste !
Comme toi, je n’aime pas les clowns non plus …
Bon jeudi, toujours humide et gris.
Bisoux, ma françoise
PS : Absente demain, RDV ORL pour suivi et “peut-être” autorisation de retirer ma sonde …
et bien me voilà renseigné sur les masques, y compris ceux des médecins, dont je me demandais pourquoi un tel appendice !
En pensant aux masques amérindiens, africains et incas, je me dis qu’ils servaient à incarner un dieu, à inspirer la crainte, puis avec l’ évolution des moeurs, à empêcher d’ être reconnu !
à Venise aujourd’ hui, ce serait plutôt carnavalesque, avec un peu de mystère.
Merci pour cet article complet !
Passe une bonne journée Françoise
Bisous
bonjour chere Françoise, je reconnais qu’au point de vue artistique, la plupart de ces masques sont fort beaux, mais je leur trouve un aspect triste, qui ne me convient pas trop ! celui des medecins est carrement repoussant, en voyant ça le patient n’avait qu’un choix ou guerir ou fuir ! mais tout ceci fait que le Carnaval de Venise avec ses costumes et ses masques, reste un modèle du genre ! bonne journee et grosses bises