Je vous ai promis hier un peu d’histoire des marchés de Noël, voilà c’est parti, je vous raconte le peu que je sais. Depuis quelques décennies, les marchés de Noël se multiplient en France car ils rapportent de l’argent aux commerçants certes, mais aussi aux communes et à l’état. Les marchés de Noël sont des opérations commerciales et le côté religieux de la date est oublié ; dans notre monde de moins en moins chrétien la célébration de la naissance de Jésus est abandonnée peu à peu.
Tout d’abord, je dois remettre les pendules à l’heure, c’est-à-dire rétablir une vérité. Bien qu’honorant la naissance du Christ, la fête de Noël n’a commencé à être célébrée pour cette raison que bien après le Moyen-Age.
Autrefois, les Germains vénéraient le soleil, ils célébraient, au solstice d’hiver, une fête au cours de laquelle ils offraient en sacrifice à Wotan (ou Odin, dieu principal de la mytologie nordique, dieu du savoir, de la guerre et des morts) et à Donar (appelé aussi Thor, dieu du Tonnerre ) des chevaux et des sangliers. Les chrétiens célébraient, à peu près à la même date, l’apparition du Saint-Esprit et la naissance de Jésus. Ces fêtes si différentes, la païenne et les chrétiennes, se suivant de si près, ne pouvaient subsister dans le temps sans dommage pour l’une ou pour l’autre. Voilà comment les choses se sont donc passées.
L’empereur romain Aurélien souhaitait unifier religieusement son vaste empire. Il institutionnalisa le culte solaire de Sol Invictus, divinité très populaire dans les armées du Danube à laquelle pouvaient adhérer les Orientaux adorateurs de Baal et les élites s’intéressant au néo-platonisme. Le 25 décembre fut inscrit au calendrier comme fête de la naissance de Sol Invictus, le lendemain de la fin des Saturnales. Aurélien en choisissant cette date contentait un maximum de citoyens en plaçant la fête dans la continuité des festivités traditionnelles romaines.
Plus tard, les chrétiens, en choisissant cette même date pour la célébration du jour de naissance de Jésus de Nazareth, organisaient en quelque sorte une contre-fête qui a conduit à la christianisation de ce Noël païen. La première mention de cette célébration chrétienne à la date du 25 décembre la situe à Rome en 336.
À la suite de l’édit de Thessalonique interdisant les cultes païens, la fête de Noël (du latin Natalis) devint “exclusivement ” chrétienne (catholique et orthodoxe) et l’une de ses fêtes religieuses les plus importantes durant la période médiévale en Occident. Elle fut diffusée dans le reste du monde lors de la colonisation et de l’occidentalisation contemporaine.
De nos jours, Noël conserve de nombreux éléments païens (le sapin, la bûche, le Père Noël) et s’est fortement sécularisée ces dernières années. Si nous fêtons tous Noël en Occident ce n’est pas nécessairement comme une fête religieuse, c’est simplement un jour férié qui permet le regroupement familial autour d’un repas festif et l’échange de cadeaux, un peu comme le Nouvel An en Chine. (Il est vrai que ce jour de congé permet également la participation aux messes de Noël. Nous connaissons tous cette fameuse messe de minuit, même si nous n’y avons jamais participé, grâce aux histoires racontées par Alphonse Daudet – “Trois messes basses“, l’histoire d’un curé qui n’écoute plus la voix de la raison, ni celle de son coeur mais seulement les appels de son estomac -.
Après Pâques, Noël est la deuxième fête la plus importante du calendrier liturgique chrétien.)
J’en viens aux coutumes actuelles de Noël et aux marchés.
La fête commence avant la date : c’est la période de l’Avent qui débute le premier décembre et même un peu plus tôt, fin novembre en Allemagne.
1° – La tradition de la couronne de l’Avent vient d’Allemagne. Au XIXe siècle, un pasteur fabriqua une couronne de bois avec vingt petites bougies rouges et quatre grandes bougies blanches, un total de 24 bougies comme les 24 jours décembre qui précèdent le jour de Noël ! Chaque matin une petite bougie blanche était allumée et chaque dimanche une grande bougie était allumée. Aujourd’hui, la coutume n’a conservé que les quatre grands cierges, un pour chaque dimanche de l’Avent.
2° – Le calendrier de l’Avent nous vient aussi d’Allemagne. A l’origine, au XIXe siècle, on distribuait chaque matin aux enfants des images (le plus souvent une image religieuse) durant 24 ou 25 jours pour les faire patienter jusqu’à Noël. Au XXe siècle, un éditeur est le premier à commercialiser un véritable calendrier, d’abord composé de simples dessins colorés sur un support en carton, puis quelques années plus tard un calendrier avec des petites portes ou des fenêtres à ouvrir. Petit à petit, les images ont été remplacées par des bonbons, des petits chocolats, des friandises diverses et de petits jouets. Ces calendriers se sont généralisés, commercialisés dans les grandes surfaces, un peu partout et même sur internet. Aujourd’hui les calendriers de l’Avent deviennent créatifs et prennent des tas de formes différentes, parfois assez éloignées du calendrier traditionnels : guirlande de sachets, petites boîtes empilées, chaussettes surprises…
En Allemagne, des maisons entières sont transformées en calendrier de l’Avent géants. Les véritables fenêtres jouent le rôle des cases, découvrant peu à peu des scènes colorées. Il parait que l’Hôtel de Ville de Gengenbach en Forêt-Noire (photo ci-dessous) se transforme chaque année en calendrier d’Avent, le plus grand du monde : aux vingt-quatre fenêtres de l’Hôtel de ville (qui date du XVIIIe siècle) apparaissent une à une des images au cours des vingt-quatre premiers jours de décembre.
3° – Les marchés de Noël ou plus justement des marchés de l’Avent sont destinés eux-aussi à nous faire patienter en attendant Noël et à préparer la fête (et à se préparer à faire la fête). Ils s’installent dès la fin du mois de novembre jusqu’à Noël, ou même dans certaines villes jusqu’à fin décembre. Cette tradition germanique du XIVe siècle s’est répandu dans toute l’Europe et dans le monde occidental. On y vend traditionnellement des couronnes de l’Avent, des sapins de Noël, des décorations, etc. On y trouve du vin chaud, de quoi manger, bref tous les produits traditionnels de Noël sans oublier des bijoux, des vêtements, des jouets…
La coutume d’offrir des cadeaux de Noël est apparue au cours du XVIe siècle. Le jour d’usage était alors le jour de Saint-Nicolas (jour que les Lorrains, les Alsaciens et les gens du Nord ont conservé et je reviendrai plus tard sur Saint Nicolas).
Si la fête païenne du solstice d’hiver était marquée par de grands sacrifices, le dîner de Noël en Allemagne (et ailleurs) se distingue par un repas particulièrement copieux. Apparaît sur la table de Noël le rôti de porc, pour remplacer le sanglier qui était chez les Germains un animal sacré, des petits gâteaux en forme d’animaux offerts auparavant en sacrifice.
Le paganisme a laissé d’autres traces : dans la région du Weserbergland, on suspend un bout de saucisson de Noël entamé durant le Réveillon à une poutre pour qu’il préserve la famille de la maladie durant l’année à venir ; ailleurs un saucisson entier est enfoui dans une botte de paille, laquelle est jetée au fumier pour que la future récolte soit bonne.
A côté des coutumes rurales, il en est d’autres qui sont communes à la ville est à la campagne. Dans la Forêt-Noire, on sonne avec un long cor, souvenir de l’époque où l’horlogerie et le réveille-matin n’existaient pas encore. Certaines villes, comme Bonn, érigent des grandes pyramides de Noël,. Tous les artistes amateurs sont mobilisés, plus particulièrement les sculpteurs sur bois. Ils viennent aux marchés et vendent les bonshommes, les brûle-parfums, les anges, crèches et autres produits d’une industrie traditionnelle.
Voilà une des pyramides des marchés de Noël de Bonn. Celle-ci abrite des cuisiniers, rôtisseurs, pourvoyeurs de nourriture.
Il existe une coutume de Noël, loin des marchés, la coutume la plus bruyante que l’on puisse imaginer, elle provient de la région des Alpes bavaroises. Là-bas, on fête la Nuit Sainte par un tir au fusil qui réunit plus de mille tireurs grimpés sur les montagnes avoisinantes. Plus de soixante-mille coups de feu sont tirés en l’espace d’une heure. L’écho des salves se répercute, roule et s’accroît entre les murailles rocheuses jusqu’à devenir un fracas de tonnerre. Cette coutume trouve son origine dans l’effroi séculaire des hommes devant les puissances malfaisantes nées de leur imagination qui veut que celles-ci ne puissent être chassées que par le bruit et la lumière. Voilà qui me fait penser aux rouleaux des pétards chinois rouges du Nouvel An.
Merci pour cet article très intéressant, j’y ai appris beaucoup de choses.
Perso, je ne fête plus nowel, ni religieux, ni païen …
Le dernier, avec ma maman chérie fut un vrai désastre, elle est décédée dans la nuit.
Je n’aime pas cette période de l’année où tout a une odeur de pognon.
Bon dimanche … en attendant … le mois de janvier.
Bisoux, françoise
L’ église catholique et romaine a souvent remplacé des fêtes païennes par des fêtes religieuses, qui avaient alors toutes les chances de perdurer.
Il me semble que l’ église catholique ,n’ a pas su évoluer avec le temps, contrairement aux réformés.
Comme toujours, lorsqu’ on se détourne de la religion, on se tourne vers le veau d’ or !
En fait, Noël est la fête de la nativité, et on aurait pu garder cet esprit, même sans religion.
Et tu as raison, dans l’ est, en Allemagne et en Autriche, on garde plus qu’ ailleurs les traditions !
Merci pour tes recherches et tes photos
Passe un bon dimanche Françoise
Bisous