Pour être compris, il faut être simple. Partant du principe que «Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément.» (Boileau, L’Art poétique), j’ai comme un doute envers la hiérarchie de l’Éducation Nationale particulièrement en ce qui concerne l’enseignement du français, à la lecture des référentiels (ex-programmes).
Des idées claires et bien ordonnées produisent toujours des discours limpides mais quand je lis ce qui suit, j’ai comme des angoisses.
Conseils fournis par la hiérarchie de l’éducation nationale aux enseignants de français :
– Prendre en compte le dispositif typographique et le paratexte.
– Dégager la valeur argumentaire des procédés d’écriture.
– Expliciter une situation d’énonciation complexe.
– Expliciter ou reformuler la thèse.
– Savoir produire un texte selon les différents types de progression.
– Savoir construire un paragraphe constituant une unité de sens.
– Savoir enchaîner des paragraphes en ayant recours à des connexions logiques ou temporelles explicites ou implicites”.
J’ai trouvé aussi : “Contextualiser des exercices qui visent l’appropriation de la morpho-syntaxe des formes verbales”,
”des activités qui sollicitent la construction d’énoncés codés de la part des élèves”, “Les dialogues comme tranche de vécu dont les élèves seront entraînés à percevoir le factuel mais aussi, modestement en sixième, l’implicite”, “des corpus de textes à analyser…”
C’est ce qu’on appelle la langue de bois, non ? Elle qui permet de cacher la vérité, de noyer une absence de pensée ou de connaissance d’un sujet sous un déluge de paroles creuses. Cette expression, récente en France (apparue dans les années 1970) vient de Russie. Avant leur révolution bolchévique, les Russes utilisaient l’expression “langue de chêne” pour se moquer du style administratif employé dans leur bureaucratie tsariste pesante. L’administration étouffe la France et les Français, à tous les niveaux, nous nous en rendons compte, de plus en plus.
Moi, ce que j’espère, c’est que les élèves arrivent à lire, à comprendre ce qu’ils lisent et à écrire quelques phrases sensées, les unes derrière les autres, sans faute d’orthographe ou de grammaire.
Et si l’on commençait par enseigner orthographe et grammaire ? “La grammaire est une chanson douce” a écrit Eric Orsenna. Ah… Que faire pour que l’enseignement du français ne devienne pas déplaisant ? Celui de “La littérature, c’est une affaire entendue, est du chagrin dominé par la grammaire” (Jean d’Ormesson).
Lire, écrire et parler doivent être des plaisirs quotidiens avec un apprentissage aléatoire à la maison et structuré à l’école. Malheureusement aujourd’hui, l’enseignement de la grammaire est un apprentissage occasionnel. Quand on travaille un texte, au détour d’une phrase, le maître explique par exemple la fonction du sujet ou celle du verbe. C’est ce qu’on appelle l’“observation réfléchie de la langue”. Moi, je me souviens des programmes immuables des semaines et des journées de classe, an primaire la leçon de grammaire revenait régulièrement deux fois par semaine.
Cet enseignement de la grammaire doit permettre l’accès au sens des phrases quelquefois alambiquées de certains auteurs ; il doit être progressif et structuré : il faut partir du plus simple pour aller au plus complexe, dans un ordre logique et programmé. La terminologie utilisée aujourd’hui en grammaire est complexe, ésotérique pour les parents ; les articles (le, la, les, un, une, des…) sont devenus des déterminants, j’en passe… De là deux inconvénients majeurs, les nouveaux mots angoissent les élèves et leurs parents. Ils dressent un rempart inaccessible devant le savoir et rompent les liens parents-enfants et grands-parents qui ne retrouvent plus du tout la grammaire qu’ils ont apprise. Si la science évolue, la grammaire est un patrimoine et l’on sait aussi que le suivi des enfants par la famille est un élément important de la réussite scolaire. Ce lien intergénérationnel est précieux : l’école devrait le renforcer et non le fragiliser.
Pour finir, au lycée, il serait bon que les élèves étudient non pas la technique du français (oxymore, asyndète, catachrèse, stichomythie…), c’est bon pour la culture générale d’avoir un vocabulaire élargi mais il est préférable d’avoir envie de lire une histoire, un roman, d’apprécier le style en général plutôt que de décortiquer du texte. Il me parait aussi indispensable de savoir situer Rabelais, Clément Marot, Victor Hugo ou qui vous voulez dans la chronologie littéraire. En résumé, il faut donner envie de lire et non dégoûter par une accumulation de savoirs inutiles. Ça me fait penser à Thomas Diafoirus et à l’un de mes billets de 2011.
En économie, nous en avons des Diafoirus qui veulent imposer aux états en déficit une grande rigueur : ils vont conduire ces pays à la récession aggravant davantage chômage et misère. Se rendent-ils pas compte, ces apprentis-sorciers (ces ignares de l’économie), qu’ils sont en train de saigner à mort le malade ? Notre pays, donc NOUS.
Et si au lieu d’idées et de propos fumeux, on parlait vrai et clair. Enfin.
*****
Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre,
Mon esprit aussitôt commence à se lasser,
Il est certains esprits dont les sombres pensées
Sont, d’un nuage épais, toujours embarrassées ;
Avant donc que d’écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L’expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
Boileau, L’Art poétique
Les vers appris par cœur, quand ils étaient compris, se révélaient fort utiles.
Bonjour Françoise
Je te souhaite un très bon mercredi
Nos amitiés bises
Qing&René
Ps : le blog va être en pause du 11 au 17 pour cause de voyage.
Les billets sont programmés
s’ adapter à ceux à qui on s’ adresse, devrait être un évidence, mais il semble que chacun veuille prêcher pour l’ ésotérisme, de peur d’ être dépossédé d’ une hypothétique compétence
bonne journée
bisous
Les avocats font des “effets de manches”, les littéraires(ou ceux qui se croient tels) des “effets de mots”…Pauvre Boileau…s’il revenait ! J’aimais la grammaire, sans être bien certaine que je l’aimerais à notre époque ! J’aimais la littérature…et je l’aime toujours surtout quand elle est compréhensible par le commun des mortels ! Nos pauvres enfants emploient des mots mis au bout les uns des autres, mais qui ne veulent pas dire grand-chose et ne les aident pas à s’exprimer….et très souvent leurs parents ne peuvent pas les aider… charabia que personne ne comprend, peut-être même pas leurs maîtres ?
Quel dommage et…quels dommages.
Comme tu parles de langage clair, j’ai trouvé ces deux phrases amusantes, je cite :
” – Voici un concept ayant ses différences conceptuellement au-dedans de lui-même et non plus au-dehors comme cela apparaît avec les théories classiques de la définition, réduisant celle-ci à la combinaison de deux moments notionnels par principe extérieurs l’un à l’autre. ”
la deuxième :
” – Le débat autour de la relativité linguistique est embrouillé par l’ambiguïté persistante autour des notions de champ notionnel et de champ sémantique. ”
Après lecture, Je suis figé …
Bonjour Françoise, quand tu parles en clair, je te comprends très bien hi hi !☺
Un matin, ça ne sert à rien.
Un matin sans un coup de main,
Ce matin, c’est le mien, c’est le tien,
Un matin de rien,
Pour en faire,
Un rêve plus loin.
Ce refrain de Jean-Jacques Goldman, pour te dire que le matin ça
sert à aimer la vie et boire un bon café entres amis.
Je te souhaite un bon jeudi dans la bonne humeur et la douceur, et
j’espère que tu vas bien, ou mieux.
A demain
Lolli
L’éducation nationale est à coté de ses pompes et ce n’est pas d’aujourd’hui….
D’ailleurs le terme “éducation ” montre bien qu’ils a coté de la plaque… car question éducation, c’est à refaire… excuse un peu ce langage châtié… mais c’est le seul qui convient avec ces gens là….