Souvenirs, souvenirs. Scott Mac Kenzie, ça vous dit quelque chose ?
Un film en couleurs aux images pas très nettes mais une chanson qui m’a fait monter les larmes aux yeux, surtout cette phrase : “There’s a whole generation with a new explanation”. Où sont-ils passés ? Que sommes-nous devenus ?
Vous souvenez-vous de (ou pour les plus jeunes savez-vous) ce qui a déclenché les événements de mai 1968 en France ?
Il me semble que tout a commencé par une envie, non, par un besoin de se faire entendre, de se faire comprendre, un besoin d’être heureux, une envie de liberté, un besoin de changer le monde. C’était une nouvelle révolution, un 1789 pacifiste sans doute sous l’influence américaine du Flower Power.
Flower Power était un slogan utilisé par les hippies des années 1960-1970. La fleur était un symbole de leur idéologie non-violente. L’expression est née à San Francisco durant le Summer of Love en 1967 ; écoutez la chanson du début. (Je suis sûre que Thibault, mon fils, serait content que je parle de San Francisco qu’il adore, mais il ne lit jamais mon blog). Le Summer of Love est un rassemblement durant lequel les hippies avaient eu pour consigne de porter des fleurs dans les cheveux et de les distribuer autour d’eux. Ils devinrent alors les « Flower Child » pour les médias. Ce pouvoir des fleurs se manifestait par des actions diverses : offrir une fleur à un agent de police pendant une manifestation, glisser une fleur dans le canon d’un fusil ou simplement en adoptant des tenues colorées,
et avoir des véhicules assortis !
En France , une volonté de changer la société : pour permettre à plus de jeunes d’accéder à l’Université, pour sortir le système universitaire de sa sclérose, pour lutter contre l’inégalité entre hommes et femmes, contre la dictature mesquine des petits chefs (et même des un peu plus grands), contre le monopole de l’information audiovisuelle, pour en finir avec la condition scandaleuse des immigrés, la misère des bidonvilles, la tristesse des HLM, l’archaïsme du patronat, de la classe politique et de la plupart des autorités constituées, la sujétion de la justice, contre la morale étroite et guindée… Est-ce que les choses ont changé ?
Oui, il n’y a plus de morale ou si peu. Pour le reste, je ne vois pas les changements et plus du tout le progrès. Plus de paix et d’amour. Peur, violence, silence ! Ecoles, collèges, lycées, universités : tout s’est détraqué. Tout le monde au bac, à la fac, sans discipline, sans effort. Démagogie ! C’est le grand n’importe quoi. Pauvre liberté ! Si les individus sont assez bêtes pour ne pas s’autodiscipliner, il faut édicter des règles claires et s’y tenir, et ne pas jouer les vierges effarouchées quand quelqu’un assène des vérités qui déplaisent mais n’en sont pas moins des vérités.
Revenons en 1968, une dernière fois et revoyons des slogans soixante-huitards. Ne sont-ils pas toujours d’actualité ?
Ceux qui font les révolutions à moitié ne font que se creuser un tombeau. (Reprise d’une phrase de Louis Antoine de Saint-Just, mort guillotiné à 26 ans, en 1794, qui se distingua pour son intransigeance et qui fut surnommé « l’archange de la Terreur » ou encore « l’archange de la Révolution ».) Avons-nous oublié trop vite nos rêves de changement pour rentrer dans un train-train sans espoir, sans rêve et nous installer dans un confort… bourgeois ? La société de 2011 est bien plus dure que celle de 1968 en France. Les Lybiens, en particulier, ne confirment-ils pas aujourd’hui la phrase de Saint-Just ?
Élections, piège à cons. N’est-ce pas ce que vous vous dites quand vous n’allez pas voter ? Proudhon, dans sa Théorie du mouvement constitutionnel au XIXe siècle, a écrit “En effet, si le grand acte qui a pour objet de produire la représentation nationale consiste à réunir une fois tous les cinq ans, ou tous les trois ans, une cohue de citoyens désignés, et à leur faire nommer un député porteur d’un mandat en blanc, et qui, en vertu de ce mandat en blanc, représente non seulement ceux qui lui ont donné leurs suffrages, mais ceux qui ont voté contre lui, non seulement la masse électorale, mais toutes les catégories de personnes qui n’ont pas voté, toutes les forces, facultés, fonctions et intérêts du corps social, je réponds, dis-je, que si c’est là ce que l’on entend par suffrage universel, il n’y a rien à en espérer, et que tout notre système politique est une mystification et une tyrannie.” Il a exprimé la même chose que vous, que ce que vous pensez aujourd’hui. L’organisation de la démocratie ne serait-elle donc pas viable sous sa forme actuelle ? “Elections, piège à cons !», «Elections, trahison !» : le dernier slogan dénonce les traîtres. Savez-vous qui sont les traitres ? Et qui sont les cons ? Eh eh, c’est nous !
Ce n’est qu’un début, continuons le combat !” Depuis le temps, ne faudrait-il pas le reprendre le combat ? “Indignez-vous” vient d’écrire Stéphane Hessel ; entendons-le ! Agissons. Chacun un peu. “Les petits ruisseaux font les grandes rivières”.
Cours camarade, le vieux monde est derrière toi. Compte tenu de l’avenir de la jeunesse française qui est malheureusement la plus précaire depuis bien longtemps, ce slogan pourrait bien revenir à la mode. Fuite en avant… On en a l’habitude, mais dans ce cas précis, pour changer le monde, serait-ce un mal ?
Reconnaissez-vous le jeune homme ?
C’est Gérard Palaprat. Cliquez sur son nom, vous entendrez une chanson : “Pour la fin du monde”.
“Etes-vous des consommateurs ou des participants ?” Comme je l’ai dit et redit sur ce blog, le mot d’ordre est devenu : “Dépensez, ne pensez pas !” Finalement, j’ai été bien conditionnée, il y a plus de 40 ans par la révolte pacifiste, passive ? J’essaie de vous réveiller, tranquillement.
“Fermons la télé, Ouvrons les yeux.” Cessez de vous abrutir. On vous vend n’importe quoi. Je cite en complément Jean Guéhenno : “Il y a deux catégories de télévision : la télévision intelligente qui fait des citoyens difficiles à gouverner et la télévision imbécile qui fait des citoyens faciles à gouverner.” Vous en pensez quoi de la télévision publique ? Alors…
Vivre sans temps mort et jouir sans entrave. Les temps morts…Il y en a trop long à dire. Une prochaine fois, dans un autre contexte. Simplement Jouissez sans entraves. Avec le SIDA, les entraves sont là. Sans commentaire.
A rêver un avenir idéal, n’avions-nous pas perdu le sens des réalités ? Avons-nous été trop égoïstes, trop hédonistes ? Certains jeunes nous le reprochent, je crois leurs critiques injustifiées : nous avons été idéalistes et pourtant, nous avons agi. AGI !
Les murs ont la parole. Avec des lots d’affiche créées par les étudiants des Beaux-Arts., revoir le premier article mai 68, aucun doute les murs parlaient et nous les entendions. Maintenant il y a des graffs, des tags. Certains sont très beaux, d’autres simplement des salissures contre lequel “on” essaie de lutter. Pollution supplémentaire ? Y a-t-il de véritables pensées ?
“Faites l’amour pas la guerre !” C’était en réaction contre la guerre du Vietnam. Pour de jeunes Américains, la contestation aussi. Nous étions solidaires de ces jeunes et ces intellectuels qui voulaient mettre un terme au conflit, qui étaient révoltés par la politique de Johnson au Vietnam et appelaient ce conflit : « sale guerre », “guerre impérialiste”.
Sous les pavés, la plage. Au moment de l’érection des barricades (oui, on érige une barricade), on avait retrouvé sous le macadam l’ancien pavement de Paris, et sous les pavés – immédiatement utilisés de la façon que l’on devine – le lit de sable sur lequel ils étaient posés. De là à la plage…
La barricade ferme la rue mais ouvre la voie. A vous les commentaires !
La chienlit, c’est lui. Sur une affiche, avec l’ombre du Général de Gaulle en fond.
La vie est ailleurs. J’ai entendu quelques années plus tard, dans X Files : “la vérité est ailleurs”.
Le patron a besoin de toi, tu n’as pas besoin de lui. Vive l’auto-entreprise ?
Les CRS aussi sont des hommes : la preuve, ils violent les filles dans les commissariats. Sans commentaire !
CRS = SS, beaucoup utilisé depuis.
Et pour finir (je suis lassée, là), les derniers slogans sans commentaire, ou si peu, et dans l’ordre alphabétique…
L’été sera chaud ! Juste avant, on avait entendu “le printemps sera chaud”. Ca n’a pas duré jusqu’à l’été.
L’imagination prend le pouvoir !
Marx est mort, Dieu aussi, et moi-même je ne me sens pas très bien.
Ne vous emmerdez plus, emmerdez les autres. Egoïste, sans doute, ça !
Ne travaillez jamais !
On achète ton bonheur. Vole-le.
ORTF : La police vous parle tous les soirs à 20 heures. Qui maintenant ?
Pour vos vacances, n’allez pas en Grèce : vous y êtes déjà. (allusion à la dictature des colonels) En réponse aux propos du Général de Gaulle : des colonels, un général. Après il y a eu Pinochet, Bokassa et d’autres encore comme Khadafi…
“La volonté générale contre la volonté du général !”
Prenez vos désirs pour la réalité.
Presse : ne pas avaler. Affiche : une étiquette sur une bouteille de poison. PQR (presse quotidienne régionale) orientée ? Et maintenant ? Pourquoi la presse people fait-elle tant d’affaires ? Pourquoi les paparazzi sont-ils aussi nombreux ? Euh… qui achète des torchons ? Ne pas tout gober ; nous le savions en ce temps-là. Rebelle attitude !
Sois jeune et tais toi ! (avec l’ombre du Général de Gaulle en fond d’affiche). Justement, rebellons-nous ! Nous l’avons fait.
Soyez réalistes, demandez l’impossible. Sans commentaire. Le pouvoir du rêve, de l’utopie.
Vous finirez tous par crever du confort. Retour au début de l’article. Avons-nous oublié trop vite nos rêves de changement pour rentrer dans un train-train et un confort… bourgeois ?
Dur de rester incorruptible et encore plus d’impliquer les gens dans des actions qu’ils ne sont pas capables d’imaginer ni disposés à accomplir.
NB. *** Demain : lundi, poésie en vert. On change !
Ce qui était bien à l’époque, c’est cet idéal que tout était possible, de vivre dans l’espoir. Je trouve que c’est un peu ce qui manque aujourd’hui pour que le monde bouge un peu…
Bien d’accord avec vous (oserai-je le toi ?), il manque l’espoir aujourd’hui.
L’espoir, c’est comme la liberté et des tas d’autres choses, ça n’arrive pas tout seul : on se force au début, on le gagne, on le garde…
Ca peut faire peur de rêver et les rêveurs passent toujours pour des asociaux, voire des malades mentaux.
Ce que je ne comprends pas c’est que pour une fois qu’une chose est gratuite, nous devrions tous en profiter. Ce n’était pas vraiment plus facile de rêver en 1968 qu’aujourd’hui, mis à part cette violence latente dans notre monde actuel.
Nous n’avions pas droit à la parole, nous l’avons prise ; nous n’avions pas beaucoup d’argent, nous avons découvert la récup, les travaux manuels, mais nous avions une grande envie de changement.
Ca n’a pas duré longtemps, nous sommes rentrés dans le rang.
Pour la morale, les choses ont en effet bien changé ! elle est devenue totalement absente….le respect ? idem… l’éducation ?
Je ne regrette pas mon temps, des choses devaient changer, mais pas tout !
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Tant à dire… un bel article, je revois ces affiches; mais, je nuance partant de ma vie; j’avais vingt ans et je n’avais pas du tout accédé, et aucune envie d’ailleurs, à la Consommation… juste, je voulais travailler, (dans l’enseignement j’ai été bien vite écoeurée de la mentalité des instituteurs, juste le temps d’avoir le diplôme !) avoir des petits conforts comme l’eau courante… ( eh oui, c’était récent en ville, depuis 1962 dans tous les foyers; en campagne l’adduction a été terminée vers 1976…) avoir chaud… le poële et la cuisinière c’est bien au cinéma, mais en réalité… , je voulais des transports, le droit de vote à 18 ans (donné en 75 par Giscard), l’égalité des salaires, ce qui n’est pas encore réalisé, la contraception… etc ! Et un ras-le-bol de la pression des ainés, de l’église, des vêtements et de leurs couleurs obligées ou interdites, tout un tas de codes et d’interdits qui font rire nos petits-enfants de nos jours !… Après avoir fait les guignols au Quartier Latin, les petits bourgeois des barricades rentraient le soir dans les belles maisons des parents et ne respectaient pas toujours l’employée de maison qui lavait leur linge. Par contre les ouvriers et les syndicats ont fait avancer les choses; l’économie ne devait pas se relever du coup des augmentations et de la 4° semaine de congés payés (mêmes arguments de nos jours). Pour les slogans, c’était un jaillissement, un ferment; traiter le Général de Gaulle de SS ou dictateur, non, je ne suis pas d’accord ; mais j’ai lu bien tard les Mémoires de Guerre et j’ai compris mieux compris sa dimension historique. .. Tout cela est un peu en vrac, excuse-moi, je reviendrai avec plaisir; bonne soirée, merci de ta visite Françoise
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